Les enquêtes internes dans un contexte suisse et américain - Instruction de l'entreprise ou Cheval de Troie de l'autorité ?
David RAEDLER
Publication CEDIDAC 101 parue le 15 mai 2018
Il est aujourd’hui de plus en plus fréquent d’entendre des débats, développements et autres discussions sur le thème des enquêtes internes. Alors que ce sujet demeurait relativement peu discuté il y a encore quelques années, plusieurs affaires et scandales récents ont participé à le mettre sur le devant de la scène, parfois en parallèle à la thématique très populaire du whistleblowing. Le célèbre US Program entre la Suisse et les Etats-Unis dans le domaine bancaire, ou plus récemment encore les déboires connus par le groupe Volkswagen au sujet du scandale des moteurs truqués, ne sont que deux exemples d’une évolution dans laquelle ces instructions internes occupent une place toujours plus centrale.
Cette évolution ne s’est toutefois pas accompagnée d’une pratique claire offrant aux personnes impliquées la sécurité juridique dont elles souhaiteraient souvent bénéficier. En l’absence de toute réglementation spécifique, les enquêtes internes doivent au contraire intégrer un moule de règles qui s’étendent du droit du travail au droit pénal, du droit des sociétés au droit de la protection des données, et dont découle un certain flou. S’étendant notamment aux droits et obligations de chacune des parties impliquées et à la possibilité d’utiliser les résultats de l’enquête lors d’une procédure étatique subséquente, ce flou s’avère d’autant plus marqué lorsque l’instruction revêt une portée internationale, notamment en lien avec les Etats-Unis.
C’est dans ce cadre que s’inscrit la présente thèse, qui se développe autour de deux axes. Alors que le premier s’intéresse aux relations entre l’entreprise et ses employés appelés à y participer, notamment au regard des droits et obligations de chacun, le second s’applique à préciser les rapports noués par l’entreprise avec l’autorité.
Loin d’être indépendants l’un de l’autre, ces deux thèmes s’imbriquent parfaitement, notamment lorsque l’on considère le risque (également étudié) que l’autorité se serve de l’enquête interne comme d’un véritable Cheval de Troie. En lui permettant « d’infiltrer » l’entreprise sans être identifiée, et donc sans être limitée par les règles plus strictes qui régissent son activité, l’enquête interne entraîne un véritable risque de contournement des droits des personnes impliquées, y compris de l’entreprise elle-même.