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Université de Lausanne        
    Dies 2002: Allocution de M. Silvio Munari, président du Sénat

 

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Mesdames et Messieurs
Plus que jamais l’Université et sa communauté vivent des heures difficiles. Mais c’est aussi un réel défi pour elles de savoir y faire face pour construire l’Université du XXIème siècle. On peut mentionner à cet égard les récents changements annoncés dans le contexte du projet triangulaire et largement repris dans la presse, les difficultés de logement des étudiants, le manque dramatique d’auditoires et de locaux pour les enseignants, chercheurs et autres personnels de support, ainsi que les perspectives encore floues de l’évolution des financements de notre institution.
Sans m’arrêter, ni prendre position relativement aux problèmes actuels, il faut rappeler qu’ils s’inscrivent dans un contexte pavé de discontinuités que le monde universitaire doit affronter depuis plus de dix ans. Jamais auparavant l’institution académique n’avait eu à subir de manière si soudaine et presque simultanée autant de fortes pressions, avec des contraintes de rapidité de temps de réponse pour lesquelles elle n’était pas vraiment préparée, contrairement peut-être aux acteurs du monde économique.

Ces problèmes et pressions sont à la fois exogènes et endogènes :
- les premiers sont dus à deux phénomènes concomitants que nous connaissons tous : la mondialisation et le développement exponentiel et extrêmement rapide de la pénétration des Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication dans toutes les activités humaines;
- les seconds sont en partie la conséquence des premiers et ont été pour l’essentiel générés par des décisions ou des encouragements politiques qui se sont succédés à une cadence élevée: l’introduction de la mobilité des étudiants, l’introduction des systèmes de crédits, la mise en place de systèmes d’évaluation de la qualité et d’accréditation, l’utilisation des Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication dans l’enseignement, l’introduction des HES (les Hautes Ecoles Spécialisées), enfin la création de la Convention de Bologne qui consiste à calquer le cursus académique européen sur le système américain.
Se sont ajoutés et s’ajoutent encore simultanément une augmentation du nombre des étudiants et une relative dégradation des taux d’encadrement ainsi qu'une augmentation subséquente des charges administratives.

A ces problèmes qui concernent tout le système de formation universitaire on peut aussi insister sur ceux qui sont actuellement propres à l’Université de Lausanne et qui découlent du projet triangulaire ou des discussions en vue de relations plus étroites avec d’autres universités romandes.
On a beaucoup reproché aux universités, en particulier dans le milieu politique, de ne pas coopérer suffisamment et de continuellement développer des activités sans coordination. On notera pourtant, qu’en Suisse Romande, au moment où je vais fêter 30 ans de fonctionnement du troisième cycle, j’aimerais dire combien de très nombreux collègues ont justement pu apprendre à se connaître et interagir dans ces troisièmes cycles, dès la fin des années soixante, le plus souvent à bien plaire. Ils ont d’ailleurs repris un essor considérable durant ces dix dernières années. Ils ont coordonné et organisé ensemble, avec des soutiens financiers dérisoires, des dizaines de séminaires de recherche ou de formation post gradués, suivis par des centaines de participants. Dans bien des cas la coordination n’a pu aller plus avant non pas à cause des enseignants, mais à cause du manque de financement et de conditions-cadres trop différentes d’une institution à l’autre.

Cette quasi ignorance de ces efforts dans le milieu externe est aussi révélateur des difficultés de communication de l’institution universitaire. Difficultés qui aujourd’hui sont encore plus lancinantes en raison du manque de moyens destinés à ce type d’activité, car il n’était pas perçu comme nécessaire d’organiser des actions répétées de communication traditionnellement réservées aux entreprises et à leurs fonctions marketing.
La soudaineté, le nombre et la vitesse à laquelle tous les problèmes ont surgi n’ont pas vraiment permis à l’Université de s’y préparer, et surtout elle ne dispose pas encore des marges de manœuvre décisionnelles, financières et humaines suffisantes pour mener de front toutes les réformes souhaitées avec la vitesse, l’expérience et les moyens adéquats.
Les multiples pressions que nous avons évoquées induisent aujourd’hui des tâches qui chargent de manière très lourde les autorités académiques, aussi bien pour le rectorat qu’au niveau des facultés. Ces tâches occupent de nombreux collaborateurs au-delà de leurs responsabilités habituelles, professeur, membres des corps intermédiaires, personnel administratif et technique, membres du rectorat et des décanats. J’aimerais profiter du Dies pour remercier chaleureusement et publiquement tous ceux, et ils sont nombreux, qui se dévouent sans compter à leur institution.

Parmi les dossiers très importants, il y a lieu me semble-t-il de considérer le problème des cursus de formation, la question des conditions-cadres nécessaires à la réussite des objectifs de coopération, les relations entre la Cité et son Université, le rôle de l’institution universitaire au sein de la Société et son système de gouvernance. Hormis la question des cursus liés à la signature de la Convention de Bologne, dont on a, de mon point de vue, mal évalué les impacts, ces problèmes ne sont pas fondamentalement nouveaux.
Le moment est pourtant venu pour le Sénat de reprendre en priorité l’étude approfondie de deux d’entre eux : l’évolution souhaitable du rôle que doit désormais jouer l’Université ainsi que le mode de gouvernance qui devrait en découler. Divers scénarios sont possibles. Charles Kleiber, Secrétaire d’Etat a proposé sa vision dans le fascicule qu’il a intitulé «Pour l’Université»; il y suggère qu’un vaste débat ait lieu qui a d’ailleurs déjà été engagé à l’Université de Lausanne en juin dernier Ce document extrêmement riche d’idées et de propositions doit impérativement faire l’objet de réflexions approfondies. Cela me semble d’autant plus important que le rôle et la place respective de l’Université et des HES, ainsi que les niveaux de formation et le système de passage entre les unes et les autres sont encore très mal définis et donnent lieu à des interprétations contradictoires, notamment en raison de la signature de la Convention de Bologne.
Il y a aussi lieu de discuter de l’ensemble des conditions-cadres nécessaires pour que les négociations entre institutions, en particulier avec les Ecoles Polytechniques Fédérales, puissent être conduites dans un véritable esprit de coopération et de complémentarité, notamment parce que les secondes peuvent réagir plus vite et disposent de ressources et de marges de manœuvre qui sont sans commune mesure avec celles des universités. Seule la Confédération peut venir en aide car les cantons n’ont pas la capacité financière suffisante pour gommer d’eux-mêmes ces disparités qui induisent des négociations asymétriques et des réponses inadéquates.
Lors de mes deux années de Présidence, je m’emploierai, avec l’aide d’Anne-Claude Berthoud, la nouvelle vice-présidente du Sénat, à instaurer un dialogue approprié avec nos autorités de tutelle, le conseil académique, les représentants des milieux politiques et les instances exécutives de l’institution. Nous comptons également mobiliser le Sénat, susciter la création de groupes de réflexion et l’inciter à construire sa vision, définir sa politique et proposer un mode de gouvernance compatible avec les nouvelles exigences de gestion d’une Université moderne, dynamique et à l’ambition internationale. Les potentiels de simplification des processus de décision, de plus grande autonomie de l’Alma Mater et de rapidité d’exécution de certaines procédures (par exemple les nominations), ne peuvent s’envisager qu’assorties d’une vision politique claire et d’un cadre de référence robuste mais souple, seuls susceptibles de donner confiance à la Cité.

 

   

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