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Mesdames et Messieurs
Plus que jamais lUniversité et sa communauté vivent
des heures difficiles. Mais cest aussi un réel défi
pour elles de savoir y faire face pour construire lUniversité
du XXIème siècle. On peut mentionner à cet égard
les récents changements annoncés dans le contexte du projet
triangulaire et largement repris dans la presse, les difficultés
de logement des étudiants, le manque dramatique dauditoires
et de locaux pour les enseignants, chercheurs et autres personnels de
support, ainsi que les perspectives encore floues de lévolution
des financements de notre institution.
Sans marrêter, ni prendre position relativement aux problèmes
actuels, il faut rappeler quils sinscrivent dans un contexte
pavé de discontinuités que le monde universitaire doit affronter
depuis plus de dix ans. Jamais auparavant linstitution académique
navait eu à subir de manière si soudaine et presque
simultanée autant de fortes pressions, avec des contraintes de
rapidité de temps de réponse pour lesquelles elle nétait
pas vraiment préparée, contrairement peut-être aux
acteurs du monde économique.
Ces problèmes et pressions sont à la fois exogènes
et endogènes :
- les premiers sont dus à deux phénomènes concomitants
que nous connaissons tous : la mondialisation et le développement
exponentiel et extrêmement rapide de la pénétration
des Nouvelles Technologies de lInformation et de la Communication
dans toutes les activités humaines;
- les seconds sont en partie la conséquence des premiers et ont
été pour lessentiel générés par
des décisions ou des encouragements politiques qui se sont succédés
à une cadence élevée: lintroduction de la mobilité
des étudiants, lintroduction des systèmes de crédits,
la mise en place de systèmes dévaluation de la qualité
et daccréditation, lutilisation des Nouvelles Technologies
de lInformation et de la Communication dans lenseignement,
lintroduction des HES (les Hautes Ecoles Spécialisées),
enfin la création de la Convention de Bologne qui consiste à
calquer le cursus académique européen sur le système
américain.
Se sont ajoutés et sajoutent encore simultanément
une augmentation du nombre des étudiants et une relative dégradation
des taux dencadrement ainsi qu'une augmentation subséquente
des charges administratives.
A ces problèmes qui concernent tout le système de formation
universitaire on peut aussi insister sur ceux qui sont actuellement propres
à lUniversité de Lausanne et qui découlent
du projet triangulaire ou des discussions en vue de relations plus étroites
avec dautres universités romandes.
On a beaucoup reproché aux universités, en particulier dans
le milieu politique, de ne pas coopérer suffisamment et de continuellement
développer des activités sans coordination. On notera pourtant,
quen Suisse Romande, au moment où je vais fêter 30
ans de fonctionnement du troisième cycle, jaimerais dire
combien de très nombreux collègues ont justement pu apprendre
à se connaître et interagir dans ces troisièmes cycles,
dès la fin des années soixante, le plus souvent à
bien plaire. Ils ont dailleurs repris un essor considérable
durant ces dix dernières années. Ils ont coordonné
et organisé ensemble, avec des soutiens financiers dérisoires,
des dizaines de séminaires de recherche ou de formation post gradués,
suivis par des centaines de participants. Dans bien des cas la coordination
na pu aller plus avant non pas à cause des enseignants, mais
à cause du manque de financement et de conditions-cadres trop différentes
dune institution à lautre.
Cette quasi ignorance de ces efforts dans le milieu externe est aussi
révélateur des difficultés de communication de linstitution
universitaire. Difficultés qui aujourdhui sont encore plus
lancinantes en raison du manque de moyens destinés à ce
type dactivité, car il nétait pas perçu
comme nécessaire dorganiser des actions répétées
de communication traditionnellement réservées aux entreprises
et à leurs fonctions marketing.
La soudaineté, le nombre et la vitesse à laquelle tous les
problèmes ont surgi nont pas vraiment permis à lUniversité
de sy préparer, et surtout elle ne dispose pas encore des
marges de manuvre décisionnelles, financières et humaines
suffisantes pour mener de front toutes les réformes souhaitées
avec la vitesse, lexpérience et les moyens adéquats.
Les multiples pressions que nous avons évoquées induisent
aujourdhui des tâches qui chargent de manière très
lourde les autorités académiques, aussi bien pour le rectorat
quau niveau des facultés. Ces tâches occupent de nombreux
collaborateurs au-delà de leurs responsabilités habituelles,
professeur, membres des corps intermédiaires, personnel administratif
et technique, membres du rectorat et des décanats. Jaimerais
profiter du Dies pour remercier chaleureusement et publiquement tous ceux,
et ils sont nombreux, qui se dévouent sans compter à leur
institution.
Parmi les dossiers très importants, il y a lieu me semble-t-il
de considérer le problème des cursus de formation, la question
des conditions-cadres nécessaires à la réussite des
objectifs de coopération, les relations entre la Cité et
son Université, le rôle de linstitution universitaire
au sein de la Société et son système de gouvernance.
Hormis la question des cursus liés à la signature de la
Convention de Bologne, dont on a, de mon point de vue, mal évalué
les impacts, ces problèmes ne sont pas fondamentalement nouveaux.
Le moment est pourtant venu pour le Sénat de reprendre en priorité
létude approfondie de deux dentre eux : lévolution
souhaitable du rôle que doit désormais jouer lUniversité
ainsi que le mode de gouvernance qui devrait en découler. Divers
scénarios sont possibles. Charles Kleiber, Secrétaire dEtat
a proposé sa vision dans le fascicule quil a intitulé
«Pour lUniversité»; il y suggère quun
vaste débat ait lieu qui a dailleurs déjà été
engagé à lUniversité de Lausanne en juin dernier
Ce document extrêmement riche didées et de propositions
doit impérativement faire lobjet de réflexions approfondies.
Cela me semble dautant plus important que le rôle et la place
respective de lUniversité et des HES, ainsi que les niveaux
de formation et le système de passage entre les unes et les autres
sont encore très mal définis et donnent lieu à des
interprétations contradictoires, notamment en raison de la signature
de la Convention de Bologne.
Il y a aussi lieu de discuter de lensemble des conditions-cadres
nécessaires pour que les négociations entre institutions,
en particulier avec les Ecoles Polytechniques Fédérales,
puissent être conduites dans un véritable esprit de coopération
et de complémentarité, notamment parce que les secondes
peuvent réagir plus vite et disposent de ressources et de marges
de manuvre qui sont sans commune mesure avec celles des universités.
Seule la Confédération peut venir en aide car les cantons
nont pas la capacité financière suffisante pour gommer
deux-mêmes ces disparités qui induisent des négociations
asymétriques et des réponses inadéquates.
Lors de mes deux années de Présidence, je memploierai,
avec laide dAnne-Claude Berthoud, la nouvelle vice-présidente
du Sénat, à instaurer un dialogue approprié avec
nos autorités de tutelle, le conseil académique, les représentants
des milieux politiques et les instances exécutives de linstitution.
Nous comptons également mobiliser le Sénat, susciter la
création de groupes de réflexion et linciter à
construire sa vision, définir sa politique et proposer un mode
de gouvernance compatible avec les nouvelles exigences de gestion dune
Université moderne, dynamique et à lambition internationale.
Les potentiels de simplification des processus de décision, de
plus grande autonomie de lAlma Mater et de rapidité dexécution
de certaines procédures (par exemple les nominations), ne peuvent
senvisager quassorties dune vision politique claire
et dun cadre de référence robuste mais souple, seuls
susceptibles de donner confiance à la Cité.
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