Dans le cadre du séminaire de Marcel Burger "Médiatiser des identités publiques en contexte polémique".
Nous chercherons ici à expliciter une conception du dialogue qui organise les relations des formes d’usage du langage à la pensée, et son usage dans une intervention en clinique du travail, plus spécifiquement en clinique de l’activité.
Durant deux années, et à la demande du service de formation continue de l’Ecole Nationale de la Magistrature et dans le cadre d’une démarche d’analyse des fonctions judiciaires, nous avons poursuivi une intervention impliquant 12 juges d’instruction volontaires pour analyser leur activité, dans un contexte où tout les portait à (se) défendre (de) leur métier plutôt qu’à le promouvoir.
La culture du métier est plutôt celle de la solitude, justifiée par la double nécessité de l’indépendance et du secret. Dans le contexte institutionnel, cette culture de la solitude confine souvent à l’isolement. L’histoire du métier s’est trouvée alourdie. Et pour cause, on peut citer l’affaire d’Outreau, cette vaste erreur judiciaire qui a fait scandale à partir de 2005. L’affaire a stigmatisé le juge d’instruction, dans la société mais aussi au sein même de l’institution judiciaire.
C’est dans ce contexte que nous avons été amenés à travailler avec un collectif de juges d’instruction. Bien qu’ils soient volontaires, nous nous sommes heurtés aux difficultés à mettre en place le cadre d’analyse de ce travail sans cesse suspecté, incriminé, montré du doigt. Exposer et discuter le travail quotidien supposent en effet un cadre protégé, loin du contexte de suspicion qui menaient les magistrats à une posture défensive.
Nous proposons de reprendre le fil de la clinique du dialogue déployée dans l’intervention, où présidait avant tout un réel du dialogue, lourd et empêchant, fait de ce que l’on ne peut ni dire ni penser sans risquer de se mettre en défaut aux yeux des collègues, de l’institution, et de soi-même dans sa propre activité. Rendre à nouveau le métier dicible et discutable a supposé, ici tout particulièrement, de prendre soin du dialogue pour permettre sa transformation.
Nous chercherons à mettre en évidence la façon dont la clinique du dialogue portée par l’intervenant a permis aux professionnels de reprendre un dialogue professionnel sur les questions essentielles du métier. Pour les mettre au travail et les développer, pour ne plus se défendre d’elles, au grand bénéfice de l’efficacité des activités quotidiennes, mais aussi au bénéfice de la santé des professionnels.
Nous chercherons également à illustrer, si le temps nous le permet, la manière dont ces professionnels agissent dans le dialogue avec les personnes auditionnées, pour construire une vérité juridique inscrite dans le procès-verbal qui fera foi dans le procès criminel à venir.