Amandine D'Azevedo (Université Montpellier 3)
Conférences 2024
Mercredi 22 mai | 18h | salle Unithèque 4.215
Le grand bazar de la lanterne magique indienne
Amandine D’Azevedo (Université Paul-Valéry, Montpellier 3)
Soudain, Krishna domine le démon-serpent Kaliya au fond du fleuve ! Un miracle : l’enfant-dieu a vaincu le démon. La divinité est là, face au public. Cette image existe sur des millions de représentations en Inde, depuis des centaines d’année. Elle existe aussi dans un film, Kaliya Mardan, (1919, de Dadasaheb Phalke, le « père du cinéma indien ») et sur une petite plaque de lanterne magique…
Si le film est connu, inscrit dans l’histoire du cinéma muet indien, la plaque de lanterne, elle, est longtemps restée muette. L’unique lanterne magique indienne, déposée dans les archives du film de Pune (NFAI) pendant des décennies, a gardé tout son mystère. S’il reste peu d’éléments à son sujet, ses plaques survivantes, éclatantes de couleurs et animées, entrouvrent un univers foisonnant de dieux et de déesses, mais aussi de saynètes humoristiques et épiques. Il faut alors creuser, pour tenter de retracer les histoires de ce dispositif en Inde, pour lequel il ne reste quasiment aucune archive…
Lorsque la lanterne magique arrive en Inde, dans les bagages des colons, elle sert avant tout à des fins éducatives et religieuses : c’est un support pour promulguer des règles hygiénistes, expliquer des principes agricoles ou encore présenter la religion par le fait de missionnaires. Cette conférence propose de regarder une autre histoire : celle d’une appropriation vernaculaire, une réinterprétation magique, qui a fait de cet objet colonial le véhicule d’une imagerie indienne. En regardant les plaques animées de cette lanterne familiale, qui sera exploitée de 1892 à 1918, on plonge dans un univers coloré, religieux, où les grands héros des récits mythologiques croisent tigres et paons, où les déesses rencontrent des danseuses en rang, et où les aventures de Krishna s’entremêlent à des défilés militaires. Loin de lisser une histoire complexe, où beaucoup reste à découvrir, cette conférence propose de déplier le champ visuel à l’œuvre derrière l’histoire locale d’une famille qui, à la fin du XIXe siècle et au début du XXe, s’empare, dans la région de Bombay, d’un dispositif occidental qu’ils vont modifier, transformer, façonner pour qu’il devienne un spectacle dévotionnel populaire indien.
Vous êtes toutes et tous convié·e·s à y assister.
> Consulter le programme complet dans la rubrique "Documents" ci-contre et sur le site du groupe de recherche Dispositifs