Jouer à Tetris pendant quinze minutes peut prévenir le traumatisme psychologique des mères après un accouchement difficile : c’est ce que suggère une étude de grande envergure menée au CHUV et aux HUG et publiée dans Molecular Psychiatry. Les conclusions de cette étude ouvrent la voie à une intervention de routine pour prévenir le développement des symptômes du trouble de stress post-traumatique lié à l’accouchement.
Une équipe internationale de l’UNIL et du CHUV montre qu’une activité thérapeutique comprenant quinze minutes du jeu vidéo « Tetris » pourrait prévenir le développement des symptômes du trouble de stress post-traumatique lié à l’accouchement – ou « TSPT-A ». Cette étude à grande échelle portait sur 146 femmes, dont la moitié a joué à Tetris et l’autre moitié a réalisé une activité placebo dans les six heures suivant leur césarienne en urgence. Les résultats de l’équipe dirigée par Antje Horsch, professeure associée à la Faculté de biologie et de médecine de l’UNIL et consultante en recherche au Département femme-mère-enfant du CHUV, montrent que le groupe Tetris présentait significativement moins de symptômes de TSPT-A, et ce jusqu’à six mois après l’accouchement.
Tetris interfère avec la consolidation en mémoire des images traumatique
En engageant la région « visuospatiale » du cerveau, en charge de la vision et de l’orientation dans l’espace, le jeu Tetris pourrait interférer avec la consolidation en mémoire d’images traumatiques. Ces images jouent un rôle central dans le développement du trouble de stress post-traumatique. Comme la consolidation de la mémoire se produit en quelques heures, jouer à Tetris peu de temps après un évènement traumatique pourrait ainsi prévenir le développement du TSPT. L’équipe d’Antje Horsch est la première à prouver l’efficacité de cette intervention dans le contexte d’un accouchement difficile.
Une femme sur cinq souffre des symptômes du TPST-A
Le TSPT-A est un trouble de la santé mentale fréquent, puisqu’il touche une femme sur cinq après une césarienne en urgence. Il se manifeste principalement sous forme de flashbacks et cauchemars, d’irritabilité, de difficultés de sommeil et d’une hypervigilance concernant le nouveau-né. Ces symptômes peuvent fortement perturber la vie quotidienne et entraînent des répercussions sur toute la famille. A l’heure actuelle, la prévention du TPST lié à l’accouchement s’avère difficile en raison du manque de traitements scientifiquement validés.
Tetris pourrait aussi prévénir le PTSD après d'autres événements traumatiques
Les résultats de l’équipe d’Antje Horsch pourraient donc avoir un impact significatif sur la prévention du TSPT après un accouchement difficile, mais aussi après d’autres événements traumatiques. « Nous sommes très enthousiastes car l’activité a été réalisée sous le contrôle des sage-femmes et infirmier·ère·s des maternités, montrant ainsi qu’elle peut s’intégrer dans des soins de routine. De plus, cette intervention est brève, peu onéreuse et accessible à toute personne quel que soit sa langue maternelle. Elle a donc un véritable potentiel clinique », expliquent les Dres. Camille Deforges et Vania Sandoz, premières autrices de l’étude.
Financée par le Fonds national suisse de la recherche scientifique, l’étude a été menée de manière rigoureuse avec un protocole randomisé, contrôlé et en double-aveugle, ce qui renforce la fiabilité et la robustesse des résultats. Elle constitue ainsi une avancée importante dans les soins de santé mentale après un accouchement difficile et, plus largement, après tout évènement traumatique.
Publication :
Deforges, C.*, Sandoz, V.*, Noël, Y., Avignon, V., Desseauve, D., Bourdin, J.,Vial, Y., Ayers, S., Holmes, E.A., Epiney, M. & Horsch, A. (2023). Single-session visuospatial task procedure to prevent childbirth-related posttraumatic stress disorder: a multicentre double-blind randomised controlled trial. Molecular Psychiatry. DOI: 10.1038/s41380-023-02275-w
*Contributed equally as first authors
Personne de contact :
Prof. Antje Horsch
Institut universitaire de formation et recherche en soins (IUFRS)
Faculté de biologie et de médecine, Université de Lausanne (UNIL)
Département Femme-mère-enfant, Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV)
antje.horsch@chuv.ch