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Punk et Emo, deux fossiles au look rebelle réaccordent la partition de la diversité des mollusques

Une équipe internationale, dont fait partie Pierre Gueriau de la Faculté des géosciences et de l'environnement de l'UNIL, a identifié deux nouvelles espèces fossiles datant de 430 millions d’années. Décrites dans Nature et nommées Punk ferox et Emo vorticaudum, elles documentent une diversité morphologique et écologique jusque-là inconnue au sein d’un des groupes principaux de ces animaux.

Published on 16 Jan 2025
Rendus 3D des nouveaux fossiles d'aculifères baptisés Punk ferox et Emo vorticaudum
Rendus 3D des nouveaux fossiles d'aculifères baptisés Punk ferox et Emo vorticaudum © © Pierre et Quentin Guériau

Le groupe des mollusques (les escargots, les limaces, les moules, les nautiles, les calmars ou encore les pieuvres) est, selon les connaissances actuelles, l'un des groupes d'animaux les plus diversifiés sur Terre. Cependant, de nombreuses inconnues demeurent concernant les premiers stades de leur évolution.

Jusqu’ici, on croyait notamment que cette diversité concernait surtout l’une des deux branches principales de leur arbre évolutif. L’autre branche, les aculifères comprenait plutôt des membres dont la morphologie était restée largement inchangée au fil du temps. Une nouvelle découverte vient mettre à mal cette théorie. Une équipe de scientifiques internationale a mis au jour deux nouveau fossiles datant de 430 millions d’années, dotés d’une morphologie totalement nouvelle. Ils sont décrits dans le prestigieux journal Nature, et en font même la couverture.

L’histoire des aculifères a toujours été difficile à reconstituer pour deux raisons. D’une part, les mollusques actuels ne représentent qu'une petite fraction de la vaste diversité qui a existé par le passé, et d’autre part, leur registre fossile se limite essentiellement à leurs coquilles, et seulement de façon exceptionnelle à leurs parties molles.

L'un des rares gisements à avoir produit des fossiles d'aculifères précoces est le site de Herefordshire, en Angleterre, qui a livré une riche faune marine datant de la période silurienne, il y a quelques 430 millions d'années. Les organismes y sont préservés sous forme minéralisée et en trois dimensions, avec de nombreux restes de tissus mous, à l'intérieur de concrétions calcaires. Ils sont étudiés de manière virtuelle via la collecte d’une série de photographies prises à mesure que le fossile était poli, jusqu’à avoir été complètement détruit. L'équipe de scientifiques a déjà décrit à partir de ce gisement deux des fossiles d'aculifères les plus complets jamais découverts, tout en cherchant activement d'autres spécimens.

À la grande joie de l'équipe, deux nouvelles espèces ont été identifiées lors d’une expérience visant à étudier de manière non destructive des concrétions de Herefordshire jusqu'alors inexplorées. Pour ce faire, les chercheur·euses, dont Pierre Guériau de l’UNIL, ont utilisé la microtomographie à rayons X, une technique proche du scanner médical, sur accélérateur synchrotron. Le contraste obtenu avec cette technique est différent mais complémentaire de celui obtenu par la technique de polissage sérié, ce qui signifie que cette méthode pourra être utilisée pour étudier de manière non destructive davantage de concrétions de Herefordshire à l'avenir.

Les fossiles sont en couverture de la prestigieuse revue Nature.
Les fossiles sont en couverture de la prestigieuse revue Nature. © Quentin et Pierre Gueriau

L’anatomie des deux fossiles a été minutieusement étudiée et décrite après une méticuleuse phase de reconstitution et de dissection virtuelle sur ordinateur. Les deux spécimens ressemblent à des vers ou des limaces portant de nombreuses et longues épines dirigées vers le haut et l'extérieur, et un dessous lisse sans épines utilisé pour se déplacer. Cependant, en dehors de ces similarités, leurs morphologies diffèrent de manière significative, non seulement des deux espèces découvertes précédemment, mais aussi l'une de l'autre. L'une est nommée Punk ferox en raison de sa coiffure épineuse distinctive. L’autre, nommée Emo vorticaudum, possède deux plaques sur le haut et l’avant de sa tête, des épines plus courtes formant un motif de frange et une queue entourée d'épines torsadées en spirale.

Ces combinaisons de traits sont totalement uniques. Par exemple, l'extrémité postérieure de Emo vorticaudum ressemble à celle de certains aplacophores actuels, bien que ce groupe soit dépourvu de coquilles. Punk ferox, quant à elle, partage certaines caractéristiques avec les polyplacophores actuels, mais elle est complètement dépourvue de coquilles. De plus, Emo vorticaudum est fossilisée dans une posture suggérant qu'elle se déplaçait par "glissement", un mode de locomotion ressemblant à celui des chenilles, qui n'a jamais été observé chez aucun autre mollusque.

La découverte de Punk et Emo révèle que tôt dans leur histoire évolutive, les aculifères possédaient des morphologies et des écologies variées, comme n'importe quel autre groupe de mollusques. Les espèces actuelles ne représentent en effet qu’une petite fraction d'un groupe autrefois diversifié, avec une histoire évolutive complexe.

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