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Rendez-vous de l’innovation 2025 : les IA génératives à l’épreuve du savoir

Retour sur la 11ᵉ édition du Rendez-vous de l’innovation, qui a rassemblé plus de 55 personnes cette année, un succès qui témoigne de l’importance du sujet pour l’ensemble de la communauté des Lettres.

Published on 18 Feb 2025
Intervention de Jan Blanc lors du Rendez-vous de l'innovation
Intervention de Jan Blanc lors du Rendez-vous de l'innovation

Le 6 février dernier, le Rendez-vous de l’innovation était dédié aux intelligences artificielles (IA) génératives. Un choix qui ne relève pas du hasard: la Faculté des lettres a lancé un vaste processus de consultation et de réflexion, impliquant le dicastère Communication et innovation, porté par la vice-doyenne Nathalie Dietschy, et le dicastère Enseignement et affaires étudiantes, sous la responsabilité du vice-doyen Jérôme Jacquin. L’objectif : anticiper les transformations en cours et accompagner les membres de la Faculté face à ces nouveaux outils.

Dans cette optique, le Décanat a récemment engagé Guillaume Guex (Section des sciences du langage et de l’information) en tant que personne de référence sur les IA génératives à la Faculté. Son travail vise à répondre aux interrogations de la communauté d’enseignement et de recherche tout en contribuant à la mise en place d'un plan d'action.

Cette journée d’études s'inscrit ainsi dans une démarche collective de réflexion sur les outils d'acquisition des compétences en Lettres et sur les modalités d'évaluation des formations. Au-delà de ces aspects, il s'agit également de questionner plus largement les implications des systèmes d’IA dans nos disciplines.

Le programme de cette matinée a été ouvert par la vice-doyenne à l’Innovation, Nathalie Dietschy, qui a rappelé que les IA génératives constituent l’un des grands axes de l’actuel Décanat. L’événement a ensuite réuni les interventions de Jan Blanc (Section d’histoire de l’art), Arthur Brügger (Section de français), ainsi que Martin Grandjean (Section d’histoire), Rudolf Mahrer (Section de français) et Arthur Michelet (Section d’histoire), tous trois membres de l’avatar #IA génératives du Centre NUCLEUS.  La seconde partie de la matinée était dédiée aux discussions collectives préparées par Céline Restrepo Zea (Responsable infrastructures informatiques enseignement et recherche) et Jérôme Jacquin (Vice-doyen Enseignement et affaires étudiantes), et portait plus spécifiquement sur les problématiques d’enseignement. 

 

Parmi les points qui ont émergé durant cette matinée, trois peuvent être soulignés:
 

1. Usages des IA dans la recherche et l'enseignement

L’IA s’avère utile dans plusieurs domaines académiques, en particulier pour des tâches répétitives et/ou techniques : 

  • Synthèse et organisation de l’information : résumer des articles, extraire des passages pertinents ou encore structurer des échanges longs (par exemple, des discussions par e-mail). 
     
  • Assistance à la rédaction et correction : amélioration stylistique, détection des erreurs grammaticales et aide à la formulation d’idées. 
     
  • Gestion logistique : aide à l’organisation pratique de congrès, colloques ou journées d’études

Des outils spécialisés comme Notebook LM permettent d’interagir avec un large corpus de documents tout en contrôlant le référencement des sources. D’autres, comme Impresso, offrent des fonctionnalités avancées pour l’analyse de corpus historiques, en générant par exemple du code Python adapté aux recherches spécifiques.

Toutefois, ces outils ont leurs limites. Contrairement à un humain, une IA  fonctionne par statistiques et probabilités, en générant des phrases cohérentes, mais sans garantie d’exactitude.

De plus, les biais culturels et idéologiques représentent une problématique majeure. L’IA a ainsi tendance à privilégier des points de vue occidentaux et dominants, comme l’a illustré une expérience où ChatGPT, sommé de donner une image-type du Rendez-vous de l’innovation, a proposé une représentation exclusivement jeune et blanche.

 

Représentation du Rendez-vous de l'innovation tel qu'imaginé par ChatGPT
Représentation du Rendez-vous de l'innovation tel qu'imaginé par ChatGPT

2. IA et apprentissage : nouveaux défis

L’essor des IA génératives bouscule l’enseignement universitaire. L’exemple d’une étudiante ayant soumis un travail coécrit avec ChatGPT est venu mettre en lumière la difficulté d’appréhender l’évaluation des compétences à l’heure où tout écrit peut s’avérer écrit ou coécrit par la machine.

Cette expérience appelle une réflexion pédagogique essentielle : comment encadrer l’usage de l’IA dans l’apprentissage ? Faut-il sanctionner son emploi ou, au contraire, accompagner les étudiantes et étudiants dans une pratique plus réfléchie ?

Deux approches s’opposent : une posture restrictive, qui consisterait à interdire ou sanctionner l’usage de l’IA pour préserver l’intégrité académique, et une approche plus pédagogique, qui viserait à accompagner les étudiantes et étudiants dans une utilisation raisonnée de ces outils, en les aidant à comprendre leurs forces et leurs limites.

Faut-il alors intégrer explicitement l’IA dans les pratiques pédagogiques, en apprenant aux étudiantes et étudiants à s’en servir avec discernement ? Une approche réflexive de son usage semble nécessaire, afin d’éviter une utilisation abusive.

 

3. Enjeux éthiques et politiques des IA

L’IA peut être perçue comme une béquille intellectuelle qui, à terme, affaiblirait certaines compétences essentielles. 

L’on risque ainsi une diminution de la capacité d’argumentation et d’analyse : une étudiante ou un étudiant qui délègue trop à l’IA risque d’entraver le développement de sa pensée critique et sa capacité à structurer un raisonnement. Un risque de perte de confiance en soi et de dépendance excessive est également à redouter : l’étudiante du cas pratique plus haut a admis avoir utilisé ChatGPT par manque d’assurance, craignant de ne pas répondre aux attentes académiques.

L’IA soulève ainsi la question de la responsabilité dans l’apprentissage et la transmission du savoir : certaines personnes y voient une opportunité d’enrichissement intellectuel et d’alignement avec les exigences du marché du travail, d’autres une possible déshumanisation des savoirs et un affaiblissement des capacités d’analyse et d’argumentation des étudiantes et étudiants. L’enjeu central réside alors dans la préservation des compétences critiques – analyse, synthèse, documentation, réflexion structurée – et dans la manière dont l’IA peut être utilisée comme un levier d’apprentissage plutôt qu’un substitut.

L’IA met par ailleurs en lumière des tensions entre régulation et innovation. Son évolution rapide et imprévisible rend difficile un contrôle institutionnel, tandis que des intérêts commerciaux influencent la gestion des données. La question de la confidentialité se pose : qui détient réellement les informations fournies aux IA ? Et dans quelle mesure les universités conservent-elles leur autonomie face à des outils développés par des acteurs privés ?

 

Conclusion

L’IA peut-elle devenir un outil d’apprentissage et contribuer à l’acquisition des compétences, ou risque-t-elle au contraire de les entraver ? Cette question reste centrale dans les débats actuels sur son intégration dans l’enseignement universitaire.

Face à ces défis, la réponse institutionnelle repose sur une approche pragmatique, misant sur l’accompagnement plutôt que l’interdiction. La mise en place d’une FAQ en ligne, la désignation de référents IA, la constitution d’un groupe de travail spécifiquement dévolu à la question de l’IA dans l’enseignement, ou encore l’élaboration d’un guide de bonnes pratiques visent à encadrer ces usages sans freiner l’innovation.  


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