Résumé
Alors que la Terre se réchauffe, l’homme détruit les habitats naturels et favorise les invasions biologiques. Dans le contexte actuel de ces grands changements sociétaux et environnementaux, il est important d’évaluer l’impact que peuvent avoir ces facteurs sur l'évolution des écosystèmes et de la biodiversité. Des outils informatiques peuvent être utilisés pour prédire les conséquences des perturbations anthropiques sur les écosystèmes. Un type de modèle très utilisé associe les présences d’espèces observées sur le terrain aux valeurs de différentes cartes environnementales pour dériver des prédictions de la répartition des espèces. Ces prévisions permettent d’anticiper les changements à venir des écosystèmes et de la biodiversité. ECOSPAT à l’Université de Lausanne est spécialisé dans le développement de ce type de modèles.
Ces dernières années, de tels modèles prédictifs ont été développés dans le cadre du projet MODIPLANT (2003-2007) et utilisés pour évaluer l’impact des changements climatiques futurs sur la flore des Alpes vaudoises, mettant en évidence un risque accru pour les espèces alpines et nivales. Ces modèles préliminaires avaient été développés à une résolution de 25 m n’intégrant pas toutes la finesse des variations topographiques définissant les micro-habitats des espèces dans les paysages accidentés de montagne. Un deuxième projet, BIOASSEMBLE (2008-2012), a échantillonné trois groupes d’insectes – papillons, bourdons et orthoptères –dans les Alpes vaudoises pour étudier les relations plantes-insectes et évaluer dans quelle mesure celles-ci influencent la distribution des plantes. Un troisième projet, MICROBIAL BIOGEOGRAPHY (en cours), s’attache enfin à étudier la distribution spatiales et environnementale, la relation avec les espèces végétales et à modéliser la distribution des micro-organismes du sol (champignon et bactérie). Un nouveau projet – MODISALP – démarre maintenant avec pour but de développer des cartes environnementales à très haute résolution pour prédire la distribution des espèces végétales, d’insectes et de micro-organismes du sol.
Le projet MODISALP est donc la continuation logique des projets précédents. Il poursuit le même objectif d’évaluer l’impact des changements climatiques sur la distribution des espèces, de la biodiversité et des écosystèmes, mais avec de nouvelles données et de nouveaux moyens d’analyses. Les Alpes offrent de ce point de vue un formidable laboratoire naturel. Durant les campagnes de terrain des projets précédents, >900 relevés de végétation, >600 relevés d’insectes (papillons, bourdons, orthoptères) et >300 relevés de microorganismes du sol ont été échantillonnés. Les analyses qui ont suivi ont permis de mieux comprendre les facteurs influençant la distribution des biodiversités végétale et animales, dans le but ensuite de dériver des modèles et des scénarios d’impact du changement climatique sur les flore et faunes alpines. Ces projets contribuent donc déjà beaucoup en soi à la connaissance actuelle sur les écosystèmes et la biodiversité dans les Alpes vaudoises. Des résultats préliminaires avaient par exemple prédits des migrations en altitude et des pertes d’habitats pour de nombreuses espèces alpines. Lors du développement de ces premiers modèles, certains facteurs tels que le sol ou les relations entre espèces (plantes et insectes) n’avaient cependant pas pu être considérés, et les modèles avaient une précision géographique limitée. Des analyses préliminaires incluant les facteurs du sol et les microorganismes ont montrés l’importance de certaines propriétés chimiques du sol pour la distribution des espèces végétales. Les micro-organismes du sol, semblent aussi influencer la végétation, et par cascade, la faune.
Nous souhaitons aujourd’hui compléter les dimensions manquantes – sol, interactions plante-insectes-microbes, meilleure résolution des données, meilleures mesures de température – dans de nouveaux modèles développés à très haute résolution. Ce dernier aspect en particulier est mené en collaboration avec le laboratoire LASIG de l’EPFL (Dr. S. Joost), celle des interactions plantes-sols avec l’institut des sciences de la Terre (Dr. T. Prof. E. Verecchia) et celle des interactions plantes-micro-organismes avec le département de microbiologie fondamentale (Prof. J. van der Meer), tous deux à l’Université de Lausanne (UNIL).