Axel Bühler : "Arithmétique, géométrie et politique: L'organisation d'Israël en Nb 1-4 ; 26.", 11 mars 2024.
Cette thèse cherche à comprendre le contexte historique de rédaction et la fonction littéraire du corpus de Nb 1–4 ; 26 décrivant sous forme de listes les recensements des laïcs et du clergé d’Israël. Dans ces chapitres, les Israélites sont aussi organisés comme une armée en campagne militaire, divisée par régiments et spatialisée hiérarchiquement.
La thèse s’articule sur plusieurs axes de recherche. Tout d’abord, une étude se penche sur les fonctions rhétoriques et stylistiques ainsi que l’historicité des nombres dans les textes bibliques. Dans un deuxième temps, certains motifs militaires spécifiques à ce corpus sont comparativement analysés avec les textes grecs de campagnes militaires. Finalement, la description idéalisée de la société israélite est détaillée sous le prisme de la littérature grecque, contemporaine des auteurs judéens, réfléchissant à la définition d’une société idéale. Ces différentes recherches mènent à penser que les parties dites sacerdotales du livre des Nombres ont vu le jour durant le début de l’époque hellénistique, soit à la fin du IVe siècle av. J.-C. et dans la première moitié du IIIe siècle av. J.-C. Les résultats obtenus ont un intérêt pour la compréhension de la formation du Pentateuque et l’analyse d’autres corpus présentant des constructions littéraires identiques ou des thèmes similaires tels les Chroniques, Esdras-Néhémie ou Ez 47–48.
Philippe Therrien : "Gnose, narration et interprétation des Écritures dans les Pseudo-Clémentines. Une comparaison avec les écrits gnostiques", décembre 2023-janvier 2024
Le projet de recherche est consacré aux Homélies et Reconnaissances du Pseudo-Clément (ci-après Pseudo-Clémentines), les premiers romans chrétiens, composés en Syrie au IVe siècle. Leurs auteurs, ou les communautés responsables de leur composition, nous sont totalement inconnus, et la place de ces textes dans l’histoire du développement du christianisme n’est pas très claire. Les travaux s’efforcent donc de situer ces textes dans leur contexte de production en étudiant plus particulièrement la notion de connaissance religieuse, ou gnose, qui peut être définie comme une connaissance de type théorique qui porte principalement sur Dieu, l’origine du monde et la nature de l’être humain. Dans ce contexte, Philippe Therrien compare les Pseudo-Clémentines avec les écrits gnostiques, notamment ceux découverts en 1945 à Nag Hammadi, en Égypte. Une telle comparaison n’a pas été effectuée par la recherche et met au jour des enjeux gnoséologiques encore peu documentés. Ces textes traduisent en effet l’existence de conflits centrés autour de la connaissance religieuse que chaque acteur affirme détenir, tout en polémiquant contre des adversaires qui prétendent, eux aussi, la posséder. Dans ces circonstances, la recherche de la gnose est définie selon différentes modalités : sur quoi porte-t-elle ? Auprès de qui l’acquérir ? Et sur quelles bases peut-on la revendiquer ? Si, en contexte chrétien, ces revendications s’appuient généralement sur la Bible, les procédés herméneutiques employés diffèrent largement d’un groupe à l’autre, et les autorités invoquées pour légitimer l’interprétation des textes bibliques (révélation divine, connaissance directe de Jésus, continuité de la tradition apostolique) varient tout autant. Ce faisant, c’est dans ce contexte polémique que les Pseudo-Clémentines et les écrits gnostiques s’affrontent : chaque texte a recours à de multiples stratégies pour démontrer en quoi son modèle gnoséologique est non seulement supérieur aux autres, mais le seul quoi soit valide. Il importe encore de mentionner que ces discours sur la connaissance religieuse véritable jouent un rôle central dans la définition de l’identité sociale et religieuse des diverses communautés.
Chen Dandelot : Le livre d'Habacuc comme discours de résistance contre la domination des Séleucides. Analyse sociohistorique et littéraire, juin 2022
Le livre d’Habacuc est un texte prophétique original dans le contexte de la Bible hébraïque qui se singularise par la présence d’un hymne conclusif. L’agencement des contenus du livre et le déploiement des motifs mythologiques auxquels recourent les rédacteurs continuent de soulever de nombreuses questions. De même, aucun consensus ne se dessine dans la littérature quant à l’origine de l’hymne et son contexte de rédaction. Cette thèse apporte de nouveaux éléments de réponse à ces différentes problématiques en proposant une datation de l’hymne d’Habacuc à l’époque hellénistique, précisément sous le règne des Séleucides au tournant du IIIe et du IIe s. av. n. è. Cette étude est réalisée à partir d’une analyse littéraire de l’ensemble du livre d’Habacuc et sur la base d’une comparaison entre le scénario mythologique construit dans l’hymne et la propagande royale menée par les premiers souverains séleucides.
Teresa Scarso : The Relationship between Moses and Elijah in Ancient Judaism, décembre 2021
The discoveries of Qumran manuscripts have opened new horizons and they raise new questions on Ancient Judaism. The careful study of the non-biblical Qumran manuscripts allows one a new understanding of the functions and roles of Moses and Elijah.
While in Qumran these two figures seem intersect, in Rabbinic writings they are complementary and with a lot of similarities as in the biblical texts or if they are in competition.
Behind these conclusions, I search to identify tension between intellectual and/or social milieus and to find the theological issues of such presentations in the texts.
Hervé Gonzalez : Guerre et prophétie en Judée sous dominations hellénistiques. Lecture socio-historique du thème de la guerre en Zacharie 9-10 et ses apports pour l'étude de Zacharie 9-14, décembre 2021
La thèse porte sur les chapitres 9-14 du livre de Zacharie, un des derniers livres prophétiques de la Bible hébraïque. M. Gonzales s'intéresse plus particulièrement à la façon dont le thème de la guerre s’y déploie. L'hypothèse principale est que cette section du livre de Zacharie est rédigée tout au long de l’époque ptolémaïque (fin du 4ème et 3ème s. av. n. è) et reflète les changements significatifs liés à cette période, notamment les conflits importants entre l’Egypte et la Syrie qui prennent place dans le Levant, les modification de politique administrative par les souverains ptoléméens et l’accroissement de l’influence de la culture grecque. Cette hypothèse permet d’expliquer au mieux la forme et le contenu de Za 9-14 dans le contexte de la littérature prophétique et plus particulièrement des douze prophètes. De plus, elle permet aussi de porter un nouveau regard sur cette période peu connue de l’histoire de la Judée.
Priscille Marschall : Colometric Analysis of New Testament : Methodoligial Foundations and Application to 2 Corinthians 10-13, aout 2021
Fabian Pfitzmann: Les origines du dieu YHWH
La recherche de doctorat reprend la question des origines du dieu YHWH. Depuis plus d’un siècle, il existe une hypothèse insuffisamment fondée dans la recherche vétérotestamentaire, selon laquelle YHWH serait originaire du Sud, peut-être du désert édomite. Il faut dire, néanmoins, que les origines exactes de YHWH sont restées assez énigmatiques et la recherche reste imprécise sur beaucoup de points. En effet, cette origine est difficilement « articulable » aux autres origines de YHWH affirmées dans l’Ancien Testament. Si YHWH est une divinité qui provient du Sud quel lien existe-il entre cette origine et le cycle de l’exode ? Et comment YHWH est-il venu jusqu’en Israël pour finalement prendre le dessus sur d’autres divinités ?
La méthode pour mener à bien ma recherche est la suivante :
1) l’exégèse de 4 textes poétiques qui se trouvent hors du Pentateuque et qui affirment une origine sudiste de YHWH : Jg 5,4-5 ; Dt 33,2 ; Hab 3,3 et Ps 68,8-9. Ces textes forment une tradition à part, indépendante du cycle du Sinaï, cycle dont la vieille datation a été mise à mal ces dernières années.
2) l’exégèse d’Ex 2-4.18* qui s’insère difficilement dans le cycle de l’exode et qui situe l’origine du YHWH biblique à Madian hors d’Israël, dans un lieu différent du Sinaï et de l’Egypte. La question du lien de ces textes avec le cycle de l’exode est donc aussi traitée ici.
3) Les sources extra-bibiliques qui attestent les premières mentions de YHWH hors d’Israël.
Maïeul Rouquette : Mémoires d'apôtres des îles méditerranéennes : le cas de Tite pour la Crète et de Barnabé pour Chypre
Les processus en œuvre dans le souvenir des apôtres constituent l'objet principal de notre recherche, selon deux axes :
- Un axe chronologique, qui s'intéresse au processus de réécriture des souvenirs apostoliques.
- Un axe géographique, qui s'intéresse au processus de diffusion, autour des notions de marges et de points de passages.
Le cas des apôtres Barnabé, associé à Chypre, et Tite, associé à la Crète, constitue un lieu-test d'une telle problématique.
Notre travail se basera essentiellement sur des sources narratives, sans exclusive cependant. Il analysera non seulement la diffusion de ces sources, mais aussi les transformations des lieux hagiographiques et des motifs narratifs qu'elles contiennent. Autant que possible, il tentera d'expliquer ces transformations par le contexte, qu'il soit géographique, politique ou ecclésial.
Corinne Egasse : « Presque tous ont transgressé cet ordre-là ». Lectures et réceptions du lavement des pieds en Jn 13
Le geste johannique du Maître lavant les pieds de ses disciples est interprété par Jésus comme un exemple qu’il convient de suivre ou de mettre en pratique, conformément au triple ordre donné en Jn 13.14,15,17. Or lorsque Origène écrit au IIIe s. le premier commentaire du quatrième Évangile, il constate que « presque tous ont transgressé cet ordre-là », s’il s’agit de le comprendre littéralement comme le geste de laver les pieds corporels d’un frère. En supposant qu’il ait raison, son « presque » invite à s’intéresser aux (rares ?) chrétiens de l’Antiquité qui pratiquaient physiquement le lavement des pieds, dont on trouve déjà la trace chez les veuves de 1Tm 5.10 qui ont « lavé les pieds des saints ». Nous posons l’hypothèse que l’ordre d’imitation du Jésus johannique lavant les pieds des siens a reçu dans l’Antiquité des réponses variées dont nous établirons une typologie, allant d’une imitation spirituelle par l’enseignement (Origène) à une imitation sacramentelle (Ambroise), en passant par une imitation éthique de l’humilité du Christ (Jean Chrysostome, Augustin, Cyrille d’Alexandrie, Théodore de Mopsueste), dont une variante spécifiquement féminine de préparation des martyrs à la mort (1Tm 5.10, Tertullien). Outre les Pères de l’Église déjà évoqués et plusieurs autres qui ont écrit à propos du lavement des pieds, nous étudierons également un domaine spécifique de la réception antique : la littérature apocryphe, qui renvoie un écho à Jn 13 dans le papyrus Oxyrhynque 840 (IIe s.), dans l’Évangile de Nicodème (IVe s.) et dans le Livre du coq (Ve s.).
Ani Ghazarian : Les Béatitudes dans l'Evangile selon Matthieu 5,3-12 et leur réception dans la Tradition Arménienne
Le problème que pose le prologue du Sermon sur la Montagne est de savoir si la fonction des béatitudes mt (5, 3-12) est à l'origine impérative, c'est-à-dire parénétique et si ce sens impératif couvre les éléments de la consolation et de la promesse qui sont à l'origine des macarismes. En réalité, les deux dimensions, c'est-à-dire, l'aspect christologique, et la dimension éthique sont présents dans les béatitudes mt. Afin de déterminer s'il existe un véritable glissement de sens de l'eschatologie vers l'éthique, un examen du contexte narratif des béatitudes serait la clef de lecture du texte immédiat. L'examen narratologique du contexte littéraire permettra de procéder à une compréhension plus fine du contexte narratif dans lequel les béatitudes mt s'insèrent, à savoir à la suite de trois péricopes (Mt 4,12-17; 18-22; 23-25) qui illustrent de manière programmatique le ministère de Jésus en Galilée où il enseigne (23b), il proclame la bonne nouvelle du Règne (23c) et il guérit (23d). Cette présentation du ministère de Jésus est tout entièrement centrée sur l'irruption du Règne, comme d'ailleurs tout le Sermon sur la Montagne (Mt 5,3.10.20; 6,33; 7,21). Une attention particulière à la réception du Sermon sur la Montagne chez les Pères de l'Eglise Arménienne sera accordée, afin de voir le type d'interprétation que les pères arméniens ont adopté du texte des béatitudes mt. Ceci, afin de reconstruire l'histoire de leur réception dans une filière particulière, en l'occurrence dans la tradition patristique arménienne jusqu'à présent inexplorée.