Anciennes questions et réponses

 

 

 

  • Après avoir effectué un signalement, comment aider l'enfant concernant les suites psychologiques de ce signalement (souvent il est plus mal après qu'avant)?
     

    De manière générale, les professionnel·les qui constateraient des signes de détresse psychologique aigus chez un enfant dont la situation vient d’être signalée, devraient solliciter les ressources à disposition au sein de leur lieu de travail, et proposer aux parents que leur enfant soit suivi dans ce cadre ou chez un·e « psy » privé·e. En cas de refus de la part des parents, et si l’enfant continue de manifester des troubles importants, le ou la professionnel·le peut en référer au SPJ afin qu’une solution de prise en charge soit, idéalement, rapidement mise en place.

    La réponse à cette question dépend du rôle qu’a auprès de l’enfant le ou la professionnel·le concerné·e. S’il s’agit d’un·e enseignant·e, il ou elle ne doit pas chercher personnellement à résoudre les problèmes psychologiques liés aux répercussions du signalement. Ce n’est pas son rôle et sa relation à l’enfant doit rester une relation de maître·sse à élève. (Concernant la relation pédagogique et le comportement à avoir avec un·e élève ayant été maltraité·e, consultez la réponse à la question qui traite ce point dans la présente FAQ). En cas de signes de détresse aigus manifestés par l’enfant, l’enseignant·e devrait, en premier lieu, en parler avec ses collègues pour savoir s’ils ou elles remarquent les mêmes troubles ou si l’enfant est suivi au niveau psychothérapeutique. Si ses craintes se confirment, il peut alerter le service de psychologie scolaire ou l’infirmier·ère scolaire, ou encore s’en ouvrir au médiateur·trice scolaire. Il ne faut pas oublier que l’enfant ne peut être adressé à l’un de ces services qu’avec l’accord de ses parents. En l’absence d’un tel accord, et si la gravité des troubles le justifie, il ou elle peut solliciter sa hiérarchie pour qu'elle en réfère au SPJ. De toute façon, après avoir reçu un signalement, le SPJ effectue une enquête sociale pour savoir comment aider l’enfant et sa famille.

    Concernant cet accord parental, il arrive que les parents dont l’enfant a été signalé au SPJ se sentent eux-mêmes mis à mal par le signalement, et ils n’ont pas toujours envie de suivre les conseils de gens qui sont à l’origine de leur situation.
    Or, les parents ne réagissent pas tous de cette façon. Souvent, l’un d’eux au moins peut entendre les intervenant·es et vouloir aider son enfant qu’il ou elle voit souffrir ; beaucoup de parents sont même parfois soulagés de recevoir de l’aide qu’ils n’osaient pas solliciter jusque-là.

    Quant aux éducateurs·trices de la petite enfance, ils ou elles peuvent relever les signes manifestés par l’enfant et en parler lors d’un colloque avec l’équipe éducative. Celle-ci peut alors décider de faire appel au médecin responsable de la structure après en avoir parlé avec les parents, ou conseiller à ceux-ci de consulter leur pédiatre.

    Enfin, n’oublions pas qu’en cas de comportements imminents et dangereux manifestés par l’enfant à son égard ou à l’égard d’autrui, tout·e professionnel·le peut appeler un médecin des urgences pédopsychiatriques ou y amener l’enfant, au besoin sans l’accord des parents.

    Mars 2009

     

     

    [Retour à la question]

  • Que dire des violences structurelles ou institutionnelles subies par les enfants?
     

    Les institutions dont nous parlons ici sont des structures organisées dont les missions, les actes, les décisions touchent des mineur·es. Plus un enfant est en dépendance dans ces contextes, plus il y a potentiellement risque de violence ou de mauvais traitement. Sont concernés, les lieux de vie des enfants (homes, foyers…), les écoles publiques, structures d’enseignement spécialisé, centres de soins, prisons pour mineurs. Sont à considérer aussi, les structures administratives (services sociaux, police, justice…) et les institutions religieuses ou sportives.
    Quand les actes maltraitants sont le fait d’adultes oeuvrant au nom d’une institution, ils entrent dans la catégorie des mauvais traitements institutionnels.

    Les violences peuvent être de l’ordre d’abus physiques, psychologiques, sexuels ou relever de la négligence : non-respect des besoins permettant un développement harmonieux de l’enfant.

    Ces besoins sont évolutifs et correspondent aux cultures de sociétés et aux connaissances acquises. Par exemple, en occident en ce début de XXIème siècle, on met davantage l’accent sur l’importance d’aspects liés à l’estime de soi. Peu considérée jusqu’il y a peu, cette dimension touche particulièrement le regard porté par les acteurs·trices institutionnel·les sur l’enfant.

    Certaines conditions favorisent les violences institutionnelles :
    On a largement évoqué les violences faites aux enfants placés. Ces enfants étaient confiés, sans contrôle et sans maintien de liens personnels, à des structures de prise en charge aux pouvoirs étendus.

    En outre, les professionnel·les travaillant en institution peuvent devenir maltraitant·es, par exemple lorsque :

    •  ils ou elles sont soumis·es à des idéologies ou des objectifs institutionnels inadaptés aux besoins de l’enfant ;
    • des loyautés internes entre acteurs·trices empêchent les remises en question nécessaires des actions, ainsi que lorsque les déviances individuelles sont ignorées ;
    • un fonctionnement désincarné prend le pas sur le respect des besoins de l’enfant (lorsque la règle administrative interne prime, les enfants ne sont plus des interlocuteurs mais des « cas » à traiter) ;
    • des conflits internes ou interinstitutionnels biaisent les décisions. Par exemple, lorsque le manque de coordination, les délais de décision, empêchent de mettre en place un cadre approprié et/ou de prendre les mesures nécessaires ;
    • les moyens et l’équipement institutionnel sont insuffisants et lorsque des rigidités structurelles se font sentir. Ces éléments peuvent conduire à des passages à l’acte émotionnels, des mécanismes de bouc-émissaire et d’exclusion, des mises à distance de l’environnement naturel ou des exigences d’adaptation trop importantes imposées aux enfants ;
    • l’institution souffre d’un manque de réflexion et de clarification concernant ses choix éthiques.

     

    Mars 2009

     

     

    [Retour à la question]

  • Doit-on maintenir à tout prix le lien entre l'enfant et ses parents en situation de maltraitance ?
     

    Selon la gravité de la maltraitance, et avant tout selon le vécu de l’enfant, on évaluera les bienfaits ou, au contraire, la réactivation du traumatisme qu’une telle rencontre peut exercer sur lui ou elle. Il paraît important d’entendre le ressenti de la victime et de couper momentanément le lien si nécessaire. Forcer un enfant à rencontrer le parent maltraitant risque de réactiver le traumatisme : cela peut avoir des conséquences sur son développement psychoaffectif et intellectuel, en plus de celles qui sont liées au traumatisme lui-même.

    Après un temps variable, selon l’évolution de l’enfant et celle de son parent maltraitant, les rencontres peuvent reprendre progressivement, tant dans la fréquence, dans la durée que dans le contexte. Plus précisément, il conviendrait d’évaluer comment les premières rencontres peuvent se réaliser : le lieu, la présence de tierces personnes vécues comme protectrices par l’enfant et l’activité. Autrement dit, cette rencontre se fait-elle dans un lieu public, dans un lieu thérapeutique, en prison, ou au domicile de l’enfant ? Il s’agit avant tout de trouver un endroit sécurisant pour l’enfant. Il est important que la personne qui l’accompagne soit, elle aussi, identifiée comme personne de confiance par l’enfant, mais également à distance émotionnelle du parent maltraitant.
    En effet, une rencontre parent abuseur·euse - enfant victime, accompagné de l’autre parent, est une source évidente de conflits : ceux-ci peuvent être internes à l’enfant (conflit de loyauté, sentiment de culpabilité) et/ou surgir dans l’interaction entre les trois protagonistes. Il faut aussi réfléchir à l’activité envisagée pour ce moment de rencontre, qui doit être appropriée à l’âge et au désir de l’enfant.

    Il convient d’évaluer régulièrement l’évolution de ces rencontres avant de passer d’une étape à l’autre : augmenter ou non leur fréquence et leur durée, garder la présence totale ou partielle de l’accompagnant·e (par exemple, uniquement dans les moments de transition, à l’arrivée et au départ). Selon l’état de l’enfant et l’attitude du parent, on fera évoluer les rencontres dans un sens ou dans l’autre. Il peut même arriver qu’on doive à nouveau interrompre celles-ci momentanément.

    En parallèle à ces rencontres, un travail thérapeutique peut s’avérer utile afin que l’enfant intègre la maltraitance vécue dans son parcours de vie. Son parent, bien que maltraitant, reste son parent et fait partie de sa famille et de son vécu. Le suivi thérapeutique peut aider à faire ce travail d’intégration et permet également d’évaluer le bien-fondé des rencontres ou tout au moins de participer à cette évaluation.

     

    Janvier 2009

     

    [Retour à la question]

  • Que faire lorsqu'on est confronté à la loyauté de l'enfant vis-à-vis de son abuseur·euse?
     

    La loyauté de l'enfant envers l'adulte maltraitant doit, en principe, être préservée. En effet, il est rare que sa relation avec cet adulte se réduise à l'acte maltraitant. Cet adulte a pu être un parent adéquat qui a appris à l'enfant à regarder le monde d'une manière positive, et qui lui a peut-être apporté beaucoup de bonnes choses. Il a pu aussi servir de modèle d'identification à l'enfant.

    Cela ne signifie pas qu'on doive minimiser la maltraitance subie. Elle doit être identifiée et clairement désapprouvée ; on doit sans équivoque dire à l'enfant que ce qu'il a subi est inadmissible. Une manière de le faire est de ne pas confondre l'acte et son auteur.·e L'acte est indigne, mauvais, interdit ; tous les qualificatifs négatifs adéquats peuvent servir à qualifier cet acte, mais pas son auteur·e.

    L'enfant peut avoir de la difficulté à effectuer cette distinction entre l'acte (jugé mauvais) et son auteur·e. Elle ne va pas de soi, il peut y résister. Elle est cependant une étape et un objectif essentiels de la prise en charge de l'enfant maltraité.

    Cette manière de faire demande au professionnel de prendre du recul par rapport à ses propres émotions, mais elle est indispensable si on veut préserver chez la victime une image positive d'elle-même et une bonne estime de soi.

    Janvier 2009

     

    [Retour à la question]

  • Après avoir effectué le signalement, comment maintenir le lien avec l'enfant?
     

    Il arrive que l’enseignant·e, l’éducateur·trice, le ou la thérapeute ou tout·e professionnel·le de l’enfance ait développé un lien fort et de confiance avec l’enfant. Si ce dernier se sent en confiance et révèle à l'adulte les mauvais traitements subis, le plus souvent sous le sceau du secret, le ou la professionnel·le ne peut pas garantir ce secret et doit souvent signaler la situation aux autorités compétentes, le SPJ dans le canton de Vaud.

    L’enfant peut alors se sentir trahi par la personne à laquelle il s’est confié et rompre le lien qui existait avec elle.
    Il arrive aussi que l’enfant soit pris en charge ailleurs et qu’on ne le voie plus: dans ce cas aussi, le lien avec l’enfant peut être rompu.
    On ne peut donc pas garantir le maintien du lien avec l’enfant après un signalement.

    Que la rupture du lien soit le fait de l’enfant ou des circonstances, le ou la professionnel·le doit garder à l’esprit qu’il ou elle a fait ce qu’il fallait et, surtout, parfois accepter que le lien ne peut pas être maintenu, alors même qu’il ou elle s’est beaucoup investi·e dans la relation avec cet enfant et sa situation.
    Le ou la professionnel·le, tout en acceptant la perte de ce lien, doit faire confiance à ses collègues et aux autres personnes qui s’occupent de l’enfant : eux aussi vont essayer de créer un lien avec l’enfant ; ce dernier ne se retrouve pas seul et sans soutien, il continue d’être aidé. C’est une sorte de « passage de témoin », difficile pour le ou la premier·ère confident·e de l’enfant, mais nécessaire pour la suite de la prise en charge.
    Le ou la professionnel·le peut aussi avoir peur que l’enfant ne fasse pas confiance à quelqu’un d’autre et qu’il ne puisse plus développer de lien avec quiconque. Là aussi, il doit faire confiance à l’enfant et à ses ressources ; il doit réaliser que si l’enfant a pu développer une relation de confiance avec lui ou elle par le passé, il doit être capable de nouer de nouveaux liens.

    En bref, on peut dire qu’après un signalement, le lien entre le ou la professionnel·le qui a effectué le signalement et l’enfant ne peut pas toujours être maintenu. Le ou la professionnel·le doit alors accepter cette rupture et faire confiance aux professionnel·les qui prennent le relais quant à leurs propres capacités à développer un lien fort avec l’enfant. Enfin, il doit aussi faire confiance à l’enfant et à sa capacité de nouer de nouveaux liens avec d’autres personnes.

    Décembre 2008

     

    [Retour à la question]

  • Structure d'accueil scolaire de l'enfant maltraité: régulière ou spécialisée?
     

    De prime abord, il n'y a pas lieu de changer l'enfant de structure scolaire à cause des mauvais traitements subis. Il faudrait au contraire qu'il puisse continuer d'être inséré dans le même réseau scolaire, social, etc, autant que possible. Ceci est important pour éviter que l'enfant soit stigmatisé à cause de ce qu'il a subi et pour empêcher qu'il développe une identité de victime.Il doit pouvoir rester un enfant comme les autres : il a le droit de rire, d'être triste, de faire des bonnes et mauvaises notes, d'être malade et de faire des bêtises, sans que l'on se réfère systématiquement aux mauvais traitements subis pour expliquer tel ou tel fait.


    En revanche, il peut arriver que l'enfant souffre de conséquences négatives liées aux mauvais traitements : il peut s'agir de troubles de l'apprentissage ou du comportement. Si ces troubles sont envahissants et l'empêchent de poursuivre sa scolarité normalement ou s'ils perturbent notoirement la classe, on doit alors se poser la question par rapport à un changement de structure scolaire pour cet enfant. Dans ce cas, il peut être approprié de lui faire suivre sa scolarité dans une filière spécialisée, au moins tant que les troubles qu'il ou elle présente l'empêchent de rejoindre la structure scolaire régulière


    Ce ne sont donc pas les mauvais traitements subis en soi qui vont dicter la décision de changer l'enfant de structure scolaire, mais les éventuelles conséquences négatives de la maltraitance (cognitives, troubles du comportement) dont l'enfant peut souffrir.

    Novembre 2008
     

     

    [Retour à la question]

  • Définir et expliquer la notion d'emprise qu'un adulte, parent ou personne connue de l'enfant, peut avoir sur lui.
     

    Il faut distinguer (a) la mise sous emprise, qui s'effectue progressivement, de (b) l'interaction abusive, entre un·e auteur·e et sa victime, une fois que l'emprise est installée.


    a) Pour comprendre comment l'emprise peut s'installer, il est éclairant d'évoquer trois processus complémentaires (on peut y voir une gradation dans l'intensité, mais ce ne sont pas des étapes chronologiques) :

    1. L'effraction est présente quand l'abuseur·euse envahit le territoire physique (chambre, objets, emploi du temps) et psychique (pensées, paroles, projets) de la victime, qui perd toute intimité et n'a plus la possibilité de garder ses propres secrets;
    2. Par la captation, l'abuseur·euse parvient à priver l'autre de son autonomie d'action et de jugement; ceci se fait par un usage non conventionnel du regard (voyeurisme et exhibitionnisme imposés), du contact corporel (non problématique au départ, il envahit peu à peu toute la sphère corporelle et intime) et de la parole (par l'usage de messages paradoxaux, comme : ce que nous faisons, tout le monde le fait, mais il ne faut le dire à personne);
    3. Par la programmation, l'abuseur·euse en vient à téléguider de l'extérieur les pensées et les réactions de l'enfant, qui est alors devenu une victime soumise, et en apparence consentante. A certains signaux manifestés par l'abuseur, qui prennent parfois la forme d'un véritable rituel, l'enfant sait que l'acte aura lieu, et il s'y soumet.


    b) Une fois installée, l'emprise rend impossible pour l'enfant la capacité de dire non et de rompre le secret. On dit parfois que la victime est "ligotée psychiquement". Et c'est grâce à cela que l'abuseur·euse obtient ce qu'il ou elle voulait : le maintien du secret. Les adultes reprocheront plus tard à l'enfant de n'avoir pas parlé (sous-entendu : si tu n'as rien dit, c'est que tu étais consentant·e). Pourtant, l'enfant n'est pas libre de parler ou de se taire.
    Le silence de l'enfant n'est donc pas une simple conséquence des craintes engendrées par les menaces de l'abuseur (si tu parles, on me mettra en prison). Pour en rendre compte, les auteur·es emploient volontiers un vocabulaire emprunté à l'univers de la sorcellerie (envoûtement, ensorcellement) ou du monde animal (le serpent qui fascine sa proie).
    Parmi les facteurs qui facilitent l'établissement du processus d'emprise, il faut mentionner la confiance inconditionnelle de l'enfant pour l'adulte, et notamment pour un parent qui lui a souvent manifesté une tendresse et une sécurité bien réelles avant de passer à un mode d'interaction abusif.


    L'emprise, telle qu'elle est décrite ci-dessus, peut aussi aider à comprendre d'autres types de maltraitance que les abus sexuels, ainsi que certains types d'interaction entre adultes.


    La notion d'emprise est abordée par plusieurs auteur·es ; la présentation ci-dessus se base sur l'ouvrage de R. Perrone et M. Nannini intitulé Violence et abus sexuels dans la famille (Paris : ESF, 1995).

    Novembre 2008
     

     

    [Retour à la question]

  • Quelle est la formation des juges par rapport à la maltraitance envers les enfants ?
     

    Il n'y a pas de formation obligatoire. Les cantons peuvent prévoir des formations pour leurs juges, mais rares sont les cantons qui le font. Il existe depuis peu une Académie suisse de la magistrature et une Ecole romande de la magistrature, dans le cadre desquelles ce genre de formation sera dispensée. Néanmoins, il n'y a aucune obligation faite aux juges de les suivre.


    Il faut toutefois rappeler que les juges n'entendent que rarement les enfants maltraités eux-mêmes, mais qu'ils ou elles ont le pouvoir de mandater des expert·es pour le faire. Cette manière de procéder est par ailleurs largement répandue.

    Novembre 2008
     

     

    [Retour à la question]

  • En cas d'un·e mineur·e enlevé·e par un parent, d'un·e mineur vivant dans une secte ou d'un·e mineur·e utilisé·e pour mendier, peut-on intervenir et comment ?
     

    En cas de soustraction d'un·e mineur·e à l'autorité parentale, il pourra y avoir une poursuite pénale pour enlèvement d'enfant au sens de l'article 220 CP.


    En cas d'utilisation, par un·e adulte, d'un·e mineur pour commettre une infraction, l'adulte pourra être poursuivi comme s'il ou elle était l'auteur·e de l'infraction en question. On dira alors qu'il ou elle en est l'auteur·e médiat·e.
    Il est donc possible d'intervenir par l'intermédiaire d'une dénonciation à l'autorité pénale.

    Novembre 2008

     

     

     

    [Retour à la question]

  • Quelle différence y a-t-il entre un enfant à risque et un enfant en danger?
     

    En général, un enfant est dit à risque lorsqu'il évolue dans un environnement défavorable ou lorsque lui-même présente des caractéristiques qui peuvent rendre son développement plus difficile que prévu. Autrement dit, un enfant à risque se trouve dans une situation comportant un ou plusieurs facteurs de risque ; ces derniers, énumérés dans de nombreuses listes, peuvent être d'ordre social (par ex grande pauvreté, chômage des parents), familial (toxicomanie parentale, violence conjugale, etc) ou/et individuel (par ex prématurité, troubles du comportement). L'existence de facteurs de risque ne signifie pas que l'enfant est maltraité : ce dernier bénéficie souvent d'autres facteurs, dits de protection, qui contribuent à son développement et qui compensent le déséquilibre induit par les risques. Dans tous les cas, la présence de nombreux facteurs de risque chez un enfant devrait susciter une attention particulière de la part du ou de la professionnel·le pour s'assurer, dans la durée, que le développement de l'enfant n'est effectivement pas compromis.


    L'enfant en danger est, lui, entravé dans son développement en raison de mauvais traitements ou de facteurs de risque trop nombreux ou délétères, et non compensés par des actions protectrices. Dans ce cas, le risque n'est pas potentiel comme ci-dessus, il est actualisé et constitue donc un danger présent pour l'enfant. Concrètement, les professionnel·les confronté·es à un enfant en danger doivent s'en inquiéter et s'efforcer de mettre en route des actions protectrices pour celui-ci : signalement des mauvais traitements, mise en route d'une psychothérapie ou de toute autre action selon le danger présent.

    Août 2007

     

     

    [Retour à la question]

  • Comment mettre en rapport les mauvais traitements et l'apprentissage scolaire ainsi que la relation pédagogique?
     

    Les spécialistes des mauvais traitements soulignent que ces derniers ont souvent une influence sur le domaine cognitif et, par suite, sur les apprentissages scolaires : on trouve des baisses de résultats et des difficultés ou inhibitions d'acquisitions, dus principalement à des troubles de la concentration et/ou du comportement de l'enfant. Ces troubles et difficultés peuvent être tant des signaux qui alertent l'enseignant·e que des conséquences de mauvais traitements qui ont déjà été identifiés. Au contraire, certains enfants maltraités surinvestissent leur travail scolaire pour éviter de penser à ce qu'ils vivent ou ont vécu : on peut dire qu'ils ou elles essaient de « faire diversion ». Dans tous les cas, c'est le changement qui domine et c'est à celui-ci que l'enseignant·e devrait rester attentif·tive.

    Concernant la relation pédagogique, il n'y a pas de bonne pratique absolue et il convient de prendre en compte que, souvent, cette relation existe déjà avant que les mauvais traitements soient découverts ; cependant, les professionnel·les s'accordent pour considérer que certains éléments sont importants : la continuité de la relation semble être bénéfique à l'enfant. En effet, les mauvais traitements et leur découverte induisent généralement de nombreux changements et ruptures pour l'enfant, ainsi, si ce dernier peut sauvegarder l'un ou l'autre domaine intact, il ne peut que bien s'en porter. Cette continuité devrait laisser la possibilité à l'enfant de se comporter comme un·e écolier·ère de son âge, pas seulement comme devrait (pense-t-on parfois) se comporter un enfant maltraité : il a le droit de faire des mauvaises (ou bonnes) notes, il a le droit aussi de faire des bêtises, d'être puni, d'être malade, tout cela sans qu'on se réfère systématiquement à son vécu traumatique pour les expliquer.

    Août 2007

     

    [Retour à la question]

  • Comment travailler avec les parents maltraitants en respectant leurs valeurs et en tenant compte de celles des intervenant·es ?
     

    Lorsqu'il y a désaccord ou confusion entre maltraitance et acte lié aux valeurs parentales, le recours à la loi fait fonction de tiers et permet de transiger. On sort ainsi d'un système de valeurs qui peut être considéré comme un jugement.

    Dans le travail faisant suite à une maltraitance avérée ou signalée, des conflits peuvent apparaître entre parents et intervenant·es autour des valeurs. Remettre au centre des préoccupations les besoins de l'enfant aide à sortir des jugements et des projections des uns et des autres. En commençant par se mettre d'accord sur les besoins de l'enfant, on peut ensuite travailler sur les moyens que chacun·e peut mettre en place pour y répondre.

    Dans les cas où les parents sont issus d'une culture différente des intervenants, l'aide d'une structure comme Appartenances peut s'avérer fort utile, afin de faire le lien entre les deux cultures.

    septembre 2007  

     

    [Retour à la question]

  • Que faire et comment gérer les situations d'enfants placés en institution qui rentrent le week-end dans leur famille où ils sont soumis à des mauvais traitements ou à un environnement délétère (drogue, alcool, etc.) ?
     

    Le placement en institution n'est pas synonyme de coupure du lien parents-enfant. Le placement se fait généralement avec le projet de retour dans la famille à court, moyen ou long terme. De ce fait, les équipes qui travaillent avec l'enfant dans l'institution cherchent toujours à maintenir un lien entre ce dernier et ses parents.

    Lorsque les mauvais traitements continuent d'apparaître ou réapparaissent lors des visites de l'enfant dans sa famille, il est nécessaire de trouver des solutions pour en protéger l'enfant, tout en maintenant le contact entre lui et les parents. Ainsi, on peut restreindre les retours de l'enfant dans sa famille, dans la fréquence comme dans la durée. On peut également aménager ces retours afin qu'ils se passent au mieux : on peut par exemple éviter les moments repérés comme source de conflits. On peut aussi organiser les retours des enfants à tour de rôle si plusieurs sont placés et que les conflits au sein de la fratrie sont source de débordement chez les parents. En parallèle, un travail d'accompagnement des parents dans leurs difficultés doit être effectué, souvent avec un·e éducateur·trice de l'institution dans laquelle est placé l'enfant.

    Si les retours à la maison ne sont pas possibles, ou alors dans le but de préparer ces retours, des rencontres parents-enfant peuvent être organisées au sein de l'institution ou à la maison, avec l'accompagnement des éducateur·trices. Des moments du quotidien peuvent de cette manière être vécus entre l'enfant et ses parents, avec le soutien d'un·e professionnel·le, garant du cadre.

    Enfin, dans les situations où le lien parents-enfant ne peut pas être maintenu, l'enfant peut passer les fins de semaine en institution (celles-ci tendent à proposer une ouverture de 365 jours par année) ou passer ces moments et les vacances dans des familles d'accueil, afin de vivre certains moments hors de l'institution et dans un cadre familial.

    Novembre 2008
     

     

    [Retour à la question]

  • Comment prendre en charge l'enfant et sa famille ? A quel moment, quelle intervention, de quel degré ?
     

    Lorsque la famille demande de l'aide, même de manière implicite, par exemple en désignant l'enfant comme problématique, on peut entendre leur demande. Les parents sont demandeurs d'un changement et on peut donc travailler avec eux et l'enfant. On peut faire le bilan des difficultés de l'enfant (scolaires, de comportement ou autre), tout en évaluant le contexte familial. En cas de mauvais traitements qui se révèlent au cours de cette investigation, une alliance thérapeutique a peut-être déjà pu se créer. Evoquer les besoins de l'enfant paraît fondamental dans un travail autour de mauvais traitements qui ont émergé. Mais il est tout aussi nécessaire de soutenir les parents qui, s'ils en arrivent à maltraiter leur enfant, se trouvent souvent démunis et/ou débordés dans leur rôle parental.

    Dans un tel contexte, l'idéal est de pouvoir travailler à plusieurs intervenant·es, l'un·e soutenant l'enfant et l'autre les parents, et l'appel au SPJ est souvent indispensable : en effet, son intervention permet d'intégrer la notion de cadre protecteur et décisionnel dans la prise en charge de la famille. Les professionnel·les, le SPJ et la famille vont pouvoir évaluer ensemble les besoins de l'enfant et des parents et aboutir à une décision : soutien thérapeutique, aide éducative à domicile (AEMO), placement en foyer temporaire si la famille fait état d'une crise ponctuelle, ou à plus long terme si les besoins de l'enfant ou les carences dont il souffre sont liés à des aspects plus fondamentaux de son développement. C'est au SPJ d'évaluer avec la Justice de Paix quel mandat il va assurer auprès de la famille en terme de surveillance ou de garde.

    Dans les nombreuses situations où les mauvais traitements apparaissent dans un contexte hors d'une demande d'aide (par plainte de l'enfant ou par suspicion ou observation d'une personne de l'entourage), l'alliance avec la famille est bien évidemment difficile à créer. Les mesures de protection de l'enfant peuvent alors intervenir contre la volonté des parents, dans un contexte de conflit entre ces derniers et les intervenant·es. Dans ces situations, c'est un travail à long terme qui est fréquemment envisagé sur les plans éducatifs, sociaux et/ou psychothérapeutiques. Il est surtout important de parvenir le plus rapidement possible à une acceptation de la part de la famille des mesures mises en place, et par conséquent de leurs difficultés, afin que l'enfant souffre le moins possible d'un double discours : celui-ci peut en effet mettre en péril les bienfaits des mesures de protection mises en place pour l'enfant et faire subir à ce dernier des conflits de loyauté fort pervers.

    septembre 2007  

     

    [Retour à la question]

  • Quelle prise en charge peut être proposée pour des adultes et des enfants ou des adolescent·es qui vivent une situation d'aliénation parentale?
     

    L'aliénation parentale fait l'objet de débats contradictoires très vifs. Il est de ce fait difficile d'en parler d'une façon sereine. Elle est indissociable du concept de syndrome d'aliénation parentale (SAP), qui a été proposé par un psychiatre américain, R. Gardner. On tentera ci-dessous de (1) voir ce qui laisse supposer qu'on est en présence d'une situation d'aliénation parentale, (2) évoquer divers cas de figure susceptibles de conforter une telle hypothèse, (3) identifier des situations qui n'en relèvent pas, malgré ce qui se donne à observer, (4) évaluer la place que prennent les diverses allégations d'abus sexuels qu'on peut rencontrer dans un tel contexte, (5) aborder de manière critique le recours à la notion pathologique de syndrome, (6) rappeler les limites de l'implication du ou de la soignant·e dans de telles situations, et (7) rappeler que l'aliénation parentale peut exister hors du contexte du divorce.

    1. Il arrive qu'un enfant dont les parents sont séparés refuse obstinément de rencontrer le parent avec lequel il ne vit pas (parent non gardien). Ce refus peut être plus ou moins catégorique, ses motivations sont plus ou moins accessibles à l'observateur·trice, selon les capacités de parole de l'enfant ou la plus ou moins grande cohérence de ses propos.

    2. Il se peut que ce refus fasse écho aux sentiments négatifs qu'éprouve le parent gardien envers son ex-conjoint·e (sentiments exprimés dans ses attitudes et, peut-être, dans ses propos). Ce refus peut aussi être le produit du désir, exprimé par le parent gardien (le plus souvent, la mère), de rompre toute relation avec son ex-conjoint·e ; or l'exercice du droit de visite empêche une telle rupture de lien. Il arrive aussi que le parent gardien tente d'introduire sciemment dans l'esprit de son enfant une représentation très négative de son autre parent, voire le persuade que ce parent est nocif·ve ou dangereux·euse. On peut ici parler de manipulation et d'aliénation : l'enfant cesse d'exprimer ce qu'il pourrait lui-même ressentir, pour devenir le porteur docile du désir et des représentations de quelqu'un d'autre.

    3. Il serait cependant erroné de voir de l'aliénation parentale chaque fois qu'un enfant refuse le contact avec son parent non gardien. Ce rejet peut avoir bien d'autres origines, à commencer par le spectacle de la tristesse et de la colère manifestées par le parent gardien, suite à une séparation. Celle-ci s'accompagne souvent de conditions qui peuvent (à tort ou à raison) sembler très injustes à l'adulte comme à l'enfant. Ce dernier repère aisément ces sentiments chez son parent, même quand celui-ci n'a aucune intention de dévaloriser l'autre parent au regard de l'enfant. Il se peut aussi que l'enfant n'aime pas se rendre dans l'environnement étranger dans lequel vit le parent non gardien (cela arrive souvent quand ce parent a une nouvelle liaison). Il se peut encore que ce parent, avec la meilleure volonté du monde, ne sache pas rendre ces visites désirables et agréables pour son fils ou sa fille. Il arrive enfin que l'enfant tente, à travers ce refus, de résoudre à moindres frais le terrible conflit de loyauté dans lequel il est placé, volontairement ou pas, par ses deux parents, parfois avec le concours de leurs alliés respectifs.

    Il ne suffit donc pas de savoir qu'un enfant refuse le contact avec son parent non gardien pour porter un «diagnostic» d'aliénation parentale. De nombreux·euses professionnel·les succombent à cette conclusion trop facile, notamment quand elle leur est suggérée par des parents gardiens dont les motivations égoïstes portent sur bien autre chose que le bien-être de leur enfant.

    4. Il est souvent question, dans un tel contexte, d'allégations d'abus sexuels. Il convient de garder la tête froide et de considérer tous les cas de figure. Il y a des allégations fondées, qui demandent des mesures protectrices appropriées : celles-ci relèvent alors d'une décision de justice. Il y a également des allégations non fondées. Parmi elles, il faut distinguer celles qui sont formulées de bonne foi, de celles qui sont volontairement inventées par un parent pour rompre tout lien entre l'enfant et son autre parent. Il semblerait que la plupart des allégations non fondées sont sincères : le parent gardien a perdu toute confiance en son ex-conjoint·e, et interprète le moindre indice chez son enfant comme une preuve de maltraitance ou d'abus sexuel. L'allégation fausse et volontaire semble rare, en tout cas de l'avis des auteurs qui se donnent la peine de fournir des chiffres documentés.

    5. Quelle que soit la réelle diversité des situations concernées, on trouve quelques aspects communs aux enfants qui refusent le contact avec leur parent non gardien. Sur ce constat, R. Gardner a proposé une entité pathologique nouvelle, le syndrome d'aliénation parentale (SAP). L'association des psychiatres américains (APA), qui édite un catalogue des diverses affections psychiatriques qui fait autorité (le DSM), a refusé d'introduire le SAP dans sa récente révision. Le SAP ne bénéficie donc d'aucune reconnaissance scientifique officielle - il est sans doute bon de le signaler!

    Cette position de l'APA nous paraît bonne, pour au moins deux raisons :

    a) Un syndrome est une abstraction : il n'est utile que s'il conserve une grande pertinence clinique. Le débat suscité en Europe comme en Amérique du Nord permet de douter que le SAP réponde à cette exigence. L'aliénation parentale existe sans aucun doute ; il est moins évident qu'elle se laisse emprisonner en un syndrome.

    b) Un syndrome désigne une pathologie. Le SAP signifierait alors qu'un parent accusé d'être à l'origine de ce syndrome a fait de son enfant, intentionnellement, un malade psychiatrique. Ceci constituerait une maltraitance grave. Un tel argument est donc une arme redoutable dans le cadre d'un procès. Certains s'en sont aperçus et savent s'en servir, l'intérêt de l'enfant passant alors au second plan. La justice peut en arriver, en s'appuyant sur des expertises qui se veulent scientifiques, à ordonner, comme mesure de protection, que l'enfant soit séparé du parent dit aliénant. Cela revient ni plus ni moins à aliéner ce parent auprès de l'enfant, et c'est la justice qui devient l'instrument d'une seconde aliénation. Certains proposent même que l'on oblige l'enfant à aller vivre contre son gré chez le parent non gardien dont il refusait le contact. Dans une telle situation, l'enfant ne peut que mal se porter, et son état nécessitera des soins - mais quels soins ?

    6. Le ou la professionnel·le du soin peut rencontrer l'aliénation parentale dans deux contextes différents. Il ou elle peut être mandaté·e comme expert·e, ou invité·e à prendre en charge un enfant qu'on lui présente comme une victime d'un processus d'aliénation parentale.

    a) L'expert·e ne peut se contenter de rencontrer l'enfant. Il doit aussi rencontrer les deux parents, et prendre des informations auprès de toutes les personnes susceptibles de lui en fournir. Il ou elle parviendra alors, peut-être, à rapporter la situation à l'un des cas de figure évoqués au point 3. Les professionnel·les sont en principe d'avis qu'un enfant a besoin de ses deux parents pour se développer harmonieusement. Que les parents soient séparés ou non n'y change rien. Selon le mandat qui lui a été confié, l'expert·e sera amené·e à formuler des propositions consistant à aménager les rencontres entre l'enfant et chacun de ses parents - sauf, bien évidemment, dans les situations où l'on a des preuves que le contact avec l'un d'eux (celui qui aliène ou celui qui est aliéné) mettrait l'enfant en danger dans son développement.

    b) Le ou la soignant·e doit clairement évaluer la demande et sa source, afin d'en sonder la validité. Tout enfant en situation de mal-être doit être aidé. L'intervention doit toutefois rester centrée sur les symptômes du patient, et préserver son intérêt avant tout. Ce n'est pas la tâche du ou de la soignant·e que de répondre aux voeux partisans d'un parent en conflit avec son ex-conjoint·e, ou de réparer une famille en crise pour la faire correspondre à l'image qu'il ou elle a de la famille, ou à celle qu'en a l'adulte demande. Si la demande adressée au ou à la soignant·e vise à faire de lui ou elle un·e allié·e dans un conflit qui oppose le ou la demandeur·euse à son (ex-)conjoint·e, le ou la soignant·e doit clairement signifier qu'il ou elle ne peut répondre à une telle demande.

    7. Divorce ou pas, un enfant pris dans un conflit familial en souffre énormément et durablement - il existe sur ce sujet une riche littérature scientifique. Les parents en conflit expriment souvent leur mal-être en dévalorisant leur conjoint aux yeux de leur enfant, qu'ils ou elles n'hésitent souvent pas à manipuler pour l'avoir « de leur côté ». Il est donc permis d'affirmer que l'aliénation parentale est largement pratiquée au sein des familles - y compris celles qui ne divorcent pas. Les thérapeutes d'enfants et de familles l'ont sans doute rencontrée et soignée depuis longtemps.

    Juillet 2007

     

    [Retour à la question]

  • Doit-on et peut-on établir un carnet de suivi d'un enfant d'une crèche dont on suppose qu'il est maltraité ?
     

    Quand un enfant est accueilli dans une crèche, on peut se renseigner auprès des parents sur les crèches qu'il a fréquentées auparavant, et, en cas de doute, contacter ces dernières après avoir obtenu l'accord des parents.
    En principe, chaque crèche consigne dans un dossier des informations sur les enfants qui lui sont confiés ainsi que les observations de l'équipe éducative. Mais la fabrication de tels dossiers est laissée à la discrétion de la crèche et il n'existe pas de règles sur la façon de le faire. Ces dossiers ne sont pas censés accompagner l'enfant dans son parcours préscolaire et scolaire. Il est évident que les règles concernant la confidentialité et la protection des données s'appliquent ici.

    Juin 2007

     

    [Retour à la question]

  • Que faire lorsqu'un enfant d'une crèche laisse supposer qu'il est maltraité à la maison ?
     

    L'interlocuteur·trice naturel·le des crèches-garderies est le ou la conseiller·ère pédagogique de la zone du canton concernée. Il ou elle est mandaté·e par le SPJ. En cas de fortes suspicions, on peut s'adresser à lui ou elle. Il est évident qu'en premier lieu, la direction de la structure d'accueil doit être mise au courant des suspicions et devrait idéalement s'impliquer dans l'évaluation de la situation de l'enfant. Plusieurs crèches ont en outre un·e médecin de référence, auquel on peut en référer, selon le type d'indices à l'origine de la suspicion. Le ou la pédiatre de l'enfant, s'il en a un·e et si l'on a l'accord des parents, demeure un·e interlocuteur·trice privilégié·e. De toute façon, une règle universelle est qu'il ne faut pas essayer de débrouiller une situation en solitaire. Il faut en parler entre collègues, et, au besoin, sur sol vaudois, demander un entretien au groupe de conseil régional prévu à l'art. 11 du Règlement d'application de la LproMin du 4 mai 2004. Ne pas sous-estimer la collaboration possible des parents (les situations d'abus sexuels demeurant réservées)! Si, après discussion au sein de l'équipe éducative de la crèche, on décide qu'un signalement au SPJ doit se faire, c'est à la direction de la structure d'accueil de le faire.

    Juin 2007

     

     

    [Retour à la question]

  • Existe-t-il un soutien pour accompagner le personnel des crèches lorsqu'il se trouve confronté à un problème de maltraitance chez un enfant ?
     

    Il n'existe pas d'organisme officiel regroupant les lieux de vie enfantine, qui correspondrait à la direction des écoles pour l'enseignement obligatoire.
    Cependant, il existe plusieurs associations professionnelles qui regroupent les directions ou les personnels des crèches et garderies:

    ARDIVE
    Association Romande des directeurs d'institutions de la petite enfance
    Section Vaud
    Case postale 17
    1000 Lausanne

    PEP
    Petite enfance Pool Service itinérant d'appui éducatif
    CVAJ, Ch. Pré Fleuri 6
    1006 Lausanne

    ARLAE
    Association des responsables des lieux d'accueil pour les écoliers
    Case postale 5189
    1002 Lausanne

    FSAE
    Fédération des structures d'accueil de l'enfance
    Centre patronal vaudois
    Rte du Lac 2
    1094 Paudex

    De plus, rien n'empêche les personnes concernées de s'organiser entre elles, pour des pratiques d'intervision, ou de supervision, par exemple en sollicitant une personne extérieure à leur lieu de travail, et compétente dans le domaine de la supervision.

    Juin 2007

     

     

    [Retour à la question]

  • Que peut-on considérer comme maltraitance psychologique et comment la définir (quels en sont les sous-thèmes par ex.) ?
     

    La maltraitance psychologique est une composante de tous les types de mauvais traitements (physiques, sexuels, actes négligents). Cependant, on peut aussi la traiter comme une entité propre. En effet, dans les études de prévalence, ce type de mauvais traitements est très répandu même si les ouvrages plus théoriques ne l'abordent que peu dans sa forme « indépendante ». C'est ce que nous tentons de faire ci-dessous.
    Par ailleurs, ce type de mauvais traitements peut se manifester dans divers contextes, principalement familial, institutionnel et scolaire. Nous abordons ici essentiellement le contexte familial qui constitue en général le premier environnement dans lequel se développe l'enfant.
    Donner une définition de la maltraitance psychologique qui englobe tout le champ concerné, et en même temps uniquement ce champ-là, est illusoire : c'est la raison pour laquelle il n'existe aucune définition qui fasse l'unanimité parmi les auteur·es. En 1995, l'ASPAC (American Professional Society on the Abuse of Children) s'y est essayé lors de la publication d'un guide de dépistage des mauvais traitements à l'intention des professionnel·les. Nous résumons la définition de la maltraitance psychologique de ce collectif comme suit :

        « pattern de comportements répétés du parent (ou de son substitut) ou comportement isolé mais extrême qui convainc l'enfant qu'il est sans valeur, raté, non aimé, non désiré, en danger, ou encore que sa valeur tient uniquement au fait qu'il satisfait aux besoins de l'autre. »

    Avant d'aborder les divers types d'actes concernés, nous soulignons quelques aspects que nous considérons comme nécessaires pour parler de maltraitance psychologique :
        -le premier tient au fait que le comportement doit être répété et avoir une certaine fréquence : dénigrer un enfant ponctuellement sous le coup de la colère n'est pas adéquat mais ne constitue pas en soi une maltraitance. En revanche, lorsqu'un parent dénigre constamment son enfant, quoi que ce dernier fasse, et que l'enfant se développe dans un «climat» de dévalorisation perpétuelle, on atteint un seuil inacceptable où le parent doit être qualifié de maltraitant.
        -l'âge de l'enfant et son niveau de développement entrent aussi en compte : un enfant systématiquement exposé à une situation qu'il ne peut pas comprendre (au niveau cognitif) ou dont la nature dépasse ses capacités d'intégration psychologique (au niveau émotionnel) se développe dans la crainte et l'incertitude, sans aucune estime de soi.

    Voici les principaux types d'actes que recouvre la maltraitance psychologique chez la plupart des auteur·es : (typologie de Hart et al., enrichie de Mignot : tous deux tirés de Gabel et al., 1996).

    - Le rejet : cette attitude est activement dirigée contre l'enfant auquel on refuse toute existence propre. L'enfant est constamment dénigré, il est l'objet de punitions inadéquates, ses besoins ne sont jamais reconnus et il est souvent le bouc émissaire sur lequel se déchargent toutes les tensions de l'adulte. Ce rejet massif de l'enfant peut s'accompagner de sadisme et prendre la forme de cruauté mentale. Dans les situations les plus graves, bien que rares, on assiste à une haine manifeste du parent à l'égard de l'enfant : il arrive que l'intervenant·e en soit témoin et qu'il ou elle se sente très choqué·e par l'attitude parentale.

    - Le dénigrement : proche du rejet, ce comportement vise à constamment déprécier l'enfant, à l'humilier, le ridiculiser et le dévaloriser.

    - Le terrorisme : l'enfant vit dans un climat de terreur où on le menace de mort, d'abandon ou de punitions cruelles. Dans cet environnement hostile et imprévisible, on peut menacer de faire du mal à des êtres ou objets qu'il apprécie ou encore lui imposer des exigences irréalistes ou inappropriées à son âge.

    - L'isolement/le confinement : cela consiste à couper l'enfant des autres, à nier ses besoins de contacts sociaux avec ses pair·es et/ou d'autres adultes. L'enfant en arrive à penser qu'il est seul au monde et qu'il ne peut compter sur personne.

    - L'indifférence face aux demandes et besoins affectifs de l'enfant : cette attitude beaucoup plus passive que le rejet est tout aussi délétère. Aucune expression d'amour ou d'intérêt n'est manifestée à l'égard de l'enfant, le parent n'est jamais disponible pour lui ; l'enfant se développe sans affection, dans un climat de grande froideur émotionnelle.

    - La corruption/l'exploitation : le parent encourage l'enfant à adopter des comportements déviants, il l'initie à la délinquance, à la toxicomanie ou à d'autres substances nocives.

    - La parentification : dans ces situations, les rôles générationnels sont inversés ; l'enfant devient le parent de son parent, et assume souvent les rôles de psychiatre, de garde-malade et de nurse de la fratrie. C'est l'enfant qui prendre soin du parent, ce dernier étant souvent dépressif, malade psychiquement, toxicomane ou alcoolique.

    - Acquisition trop précoce de compétences : on oblige l'enfant à réussir des tâches inappropriées à son âge ou à ses capacités ; constamment sous pression, il n'a jamais de répit et s'il ne réussit pas, il est dénigré. C'est dans ces situations que l'on trouve les enfants qui doivent réussir à la place des parents au niveau professionnel, sportif, etc sans qu'on tienne compte de ses intérêts et capacités.

    - Dans les systèmes éducatifs très rigides de certains parents, on retrouve l'existence d'exigences exagérées par rapport à l'âge de l'enfant. Très souvent, ces exigences lui sont imposées par chantage affectif et sous le couvert de paroles telles que « c'est pour ton bien ». Le parent impose à l'enfant sa manière d'être, de penser et de vivre, dans une relation de maîtrise présentée à l'enfant comme une relation d'amour.

    - La maltraitance peut enfin se manifester de façon indirecte : on trouve là toutes les situations où l'enfant est témoin de violences conjugales, les situations de divorce conflictuel où l'enfant est pris en otage et malmené par l'un des parents ou les deux.

    L'élément principal et commun à tous les actes exposés peut être résumé de la façon suivante : l'enfant victime de maltraitance psychologique est un enfant qui est nié dans son individualité, qui n'est pas reconnu dans ses besoins et ses désirs et qui est souvent un instrument au service du parent. Nié dans son existence propre, il n'est pas accepté ni reconnu comme un sujet humain ou, s'il est reconnu comme être humain, il est constamment dénigré.
    Nous rappelons que les attitudes exposées ci-dessus doivent être fréquentes et répétées pour être qualifiées de maltraitance : ceci implique un flou dans l'appréciation de la situation d'un enfant. Ces situations, qui ne sont pas ponctuelles et isolables dans le temps et l'espace, rendent leur dépistage et l'intervention difficiles.
    Cependant, il est nécessaire d'intervenir étant donné le caractère extrêmement nocif de ces environnements : les enfants qui grandissent dans de tels climats développent des troubles d'individuation très sévères. Ayant une piètre estime de soi, ils s'auto-dévalorisent et se perçoivent comme sans valeur, indignes de respect ou d'amour : tout cela prétérite gravement leur développement cognitif, social et psychoaffectif.

    Avril 2007


    Références utiles :

    Gabel, M., Lebovici, S. et Mazet, Ph. (sous la dir.) (1996). Maltraitance psychologique. Paris: Fleurus.

    Groupe de travail Enfance maltraitée (1992). Enfance maltraitée en Suisse. Berne.

     

    [Retour à la question]

  • Comment reconnaître les différents signes de mauvais traitements ?
     

    Il n'existe pas de « syndrome de l'enfant maltraité ». Certains types de lésions physiques sont cependant connues comme résultant de mauvais traitements : le « syndrome de l'enfant battu » et le « syndrome du bébé secoué » ne peuvent pourtant être mis en évidence que par les médecins ou personnes ayant de solides connaissances médicales, qui savent effectuer un examen clinique et interpréter des résultats médicaux, et surtout qui sont légitimés pour le faire. Mis à part le corps médical, peu de professionnel·les ont accès au corps des enfants dont ils ou elles s'occupent, raison pour laquelle nous exposons ici uniquement les indices comportementaux liés aux mauvais traitements.
    Ces signes ne sont pas propres uniquement aux mauvais traitements et ne signifient rien pris isolément. Ces indices sont repérables dans des attitudes ou des comportements, des paroles, des troubles psychosomatiques, des changements dans le mode de relation avec les pair·es ou les adultes : la notion de changement ou de rupture est ici centrale. En effet, le plus souvent ces signes éveillent l'attention du ou de la professionnel·le car ils marquent un changement chez l'enfant, quelque chose d'inhabituel apparaît dans son attitude. Dans certains cas, cette notion de rupture n'est pas présente, mais l'enfant présente toute une série de symptômes qui déroutent l'intervenant·e en raison de leur fréquence et de leur importance.
    Ainsi, en général aucun signe n'est à lui seul révélateur de maltraitance. On a plutôt affaire à un faisceau d'indices, liés bien souvent à un changement chez l'enfant, et qui interpellent l'intervenant·e. Dans une telle situation, ce·tte dernier·ère doit rester attentif·tive aux signaux d'alerte et tenter de les interpréter ; pour cela, il est important de savoir si d'autres personnes ont remarqué quelque chose et de s'enquérir du contexte de vie de l'enfant pour connaître d'éventuels événements récents qui justifieraient les changements observés chez cet enfant.

    Nous énumérons ci-dessous toutes sortes d'indices qui, mis ensemble et contextualisés, peuvent évoquer l'existence de mauvais traitements :

    - Indications générales :
    En dépit du fait que les professionnel·les n'ont pas accès au corps de l'enfant, nous mentionnons quelques indices liés à la sphère physique qui peuvent être remarqués (visage, extrémités du corps) par tout·e professionnel·le : apparitions répétées de lésions, explications contradictoires ou invraisemblables des parents concernant l'origine de lésions, appel tardif ou refus d'appel au médecin, pas de nouvelle lésion tant que l'enfant n'est pas au contact des parents.

    - Indices comportementaux, symptômes psychiques :
    manque de confiance envers les personnes de référence ou au contraire excès de confiance envers les inconnu·es
    retard ou troubles du développement (moteur, affectif, intellectuel, social, du langage, etc)
    troubles de l'alimentation (anorexie, boulimie) ou du sommeil
    énurésie, encoprésie
    dépression
    anxiété importante
    comportements agressifs et/ou hyperactifs
    comportement délictueux
    accidents répétés
    fugues
    difficultés scolaires ou de formation professionnelle, troubles de l'apprentissage
    auto-dévalorisation, manque de confiance en soi
    isolement social
    douleurs chroniques, abdominales, céphalées
    fatigue, lassitude

    - plus spécifiquement, concernant les enfants d'âge préscolaire :
    regard dit « fixe », enfant figé (« vigilance gelée »), pas de réaction lors de séparation d'avec les parents

    - concernant les adolescents :
    dépendances (alcool, drogues, médicaments)
    prostitution
    tendances suicidaires

    En plus de ces symptômes généraux, certains indices sont davantage liés au type de mauvais traitements subi par l'enfant :

    - Maltraitance physique :
    enfant qui manifeste des réflexes de protection quand on s'approche de lui, enfant qui évite les situations ou il devrait exposer des parties de son corps (gymnastique, piscine, visite médicale).

    - Abus sexuels :
    fuite des contacts corporels ou recherche avide de tels contacts avec un comportement inapproprié, comportement sexuel inadapté (attitudes sexualisées ou provocantes), activité masturbatoire excessive, discours sexuellement connoté et intérêt exagéré pour tout ce qui touche à la sexualité ou au contraire dégoût intense envers le thème du sexe et parfois du corps.

    - Négligence :
    aspect très peu soigné, mauvaise hygiène, habits inadaptés à la saison, manque de discipline, absentéisme scolaire, enfant toujours fatigué ou qui s'endort à l'école.

    - Maltraitance psychologique :
    essentiellement très mauvaise estime de soi qui a pour conséquences : timidité et retrait social, évitement de la confrontation, culpabilité et sentiment de ne pas avoir le droit de réussir.

    Avril 2007

     

    [Retour à la question]

  • Quelle est la limite entre une éducation "musclée" mais acceptable et une maltraitance ? Après avoir informé des parents qu'il est interdit de frapper son enfant, que faire si ceux-ci répondent que c'est leur moyen d'éducation ?
     

    Il n'y a pas de critère objectif qui fixe la limite entre éducation « musclée » et maltraitance. Si l'on édictait une loi interdisant et punissant les corrections physiques à domicile, on pourrait dire que le ou la  législateur·trice aurait, d'une certaine façon, considéré toute éducation musclée comme relevant de la maltraitance. En l'absence d'une telle loi, on admet que les corrections physiques deviennent un problème quand elles occupent le devant de la scène éducative (répétées, fréquentes) au détriment d'autres modes de contrôle de l'enfant, quand elles sont très violentes (administrées avec beaucoup de force physique ou à l'aide d'un objet), quand elles humilient l'enfant (si par exemple elles sont administrées en public), ou quand l'enfant ne comprend pas pourquoi il est puni de la sorte.

    Au parent qui accepte d'en débattre, on peut demander si ces corrections servent avant tout à satisfaire un besoin du parent (lui permettre d'exprimer sa colère, de se calmer) ou à obtenir un résultat chez l'enfant, comme : attirer l'attention de l'enfant sur la gravité supposée de la faute commise, ou alors l'empêcher de recommencer par crainte du châtiment douloureux.

    Les coups peuvent être intentionnels, ou résulter d'une perte de contrôle.

    Quand les coups sont intentionnels, il peut s'agir de croyances ancrées chez les parents, et renforcées par leur propre éducation ou leur propre culture. Ces croyances peuvent porter sur l'enfant (avant l'âge de raison, le contrôle physique est le seul moyen d'en faire façon) ou sur la manière la plus appropriée de produire un·e citoyen·ne obéissant·e, respectueux·euse des lois et de l'autorité. Si on estime devoir changer le comportement de ces parents, il faut aborder ces croyances, pouvoir montrer qu'elles ne sont pas validées, et qu'il y a des moyens moins coûteux pour arriver aux mêmes fins.

    Si les corrections physiques résultent d'une perte de contrôle et que l'enfant est en danger, le parent devrait être pris en charge (il existe des structures pour hommes ou parents violents). Il convient, dans ce cas, de le persuader qu'il peut porter préjudice à son enfant qu'en principe il aime, et qu'il est possible de lui venir en aide.

    On dit volontiers que les corrections physiques à but éducatif sont surtout présentes chez certaines catégories de migrant·es. Renseignements pris, des professionnel·les dont l'action est orientée vers des populations migrantes ne confirment pas cette affirmation. On trouve partout des parents qui rudoient leurs enfants, et d'autres qui ne le font pas.

    Avril 2007

     

    [Retour à la question]

  • Comment mesurer le degré de véracité de ce que raconte l'enfant sur ses parents ? Si nous l'avons signalé et que l'enfant a menti, comment faire face aux conséquences ?
     

    Il existe des instruments qui permettent d'évaluer la crédibilité des témoignages d'enfants. Ils servent avant tout à fixer la valeur de ces témoignages en justice. L'intervenant·e (enseignantªe, etc) n'a pas à les utiliser, il ou elle n'a pas à occuper la place d'un enquêteur·trice.

    Comment réagir, alors, à des propos d'enfant qui pourraient suggérer une maltraitance ?

    Le discours de l'enfant maltraité n'est pas structuré comme celui de l'enfant tout-venant. Il constitue un message à décoder. Il accompagne des comportements, des attitudes, des non-dits. L'intervenant·e, même s'il ou elle peut être dérouté·e par un message qui ressemble à un appel, mais qui ne contient rien de certain, ne doit pas laisser entendre à l'enfant que sa parole n'a pas été reçue. Il ou elle ne doit pas non plus forcer l'enfant à parler, ni lui demander à plusieurs reprises de répéter ce qu'il a dit : cela pourrait signifier pour lui qu'on ne le croit pas, et il s'enfermerait dans le silence.

    Pour savoir quoi faire avec cette parole de l'enfant, lacunaire et brouillée, la meilleure chose à faire, outre la confronter à ses attitudes et à ses comportements, est d'en parler aux collègues qui connaissent aussi l'enfant, et qui connaissent peut-être aussi sa famille. La mise en réseau des informations pertinentes peut aider soit à renforcer, soit à abandonner, une suspicion de maltraitance.

    Il est faux de croire, soit que les enfants disent toujours la vérité, soit qu'ils mentent toujours (voir la récente affaire d'Outreau en France). Si un enfant décrit des faits qui tomberaient sous le coup de la loi, mais qui se révèlent être inventés, il faut tout de même se demander pourquoi l'enfant l'a fait ; cet enfant a certainement besoin d'aide. Et si cette fausse allégation a fait l'objet d'un signalement, l'auteur·e du signalement n'est pas punissable, s'il ou elle l'a fait de bonne foi (cf art. 173 du Code pénal suisse).

    Avril 2007

     

    [Retour à la question]

Suivez nous:  
Partagez: