Les apôtres du marché : acteurs et réseaux suisses du néolibéralisme international (1969-1995)

Réquérante
Janick Marina Schaufelbuehl

Collaborateurs·trices
Hadrien Buclin (chercheur FNS senior), Margaux Lang (doctorante FNS), Gabriella Lima (doctorante FNS) et Steven Piguet (informaticien)

Financé par
FNS, voir page du projet

Durée
2023-2027

La période de 1969-1995 qui s’ouvre avec les débuts de la déréglementation monétaire en 1969 et l’effondrement du système monétaire international de Bretton Woods voit l’essor des politiques de renforcement de l’économie de marché dans la plupart des pays du Nord et du Sud global. Qualifiées de néolibérales par les chercheur·euses qui les étudient, ces réformes se caractérisent par la privatisation d’entreprises publiques, la déréglementation des marchés économiques, financiers et du travail et par un changement de paradigme avec la mise en cause de l’État-providence d’inspiration keynésienne.

Le présent projet s’inscrit dans un renouvellement actuel de l’histoire du néolibéralisme qui vise à investiguer des dimensions encore méconnues de ces réformes et à s’intéresser aux protagonistes en dehors du monde anglo-saxon. Aucune étude historique d’ampleur ne s’est penchée sur le rôle des acteurs et des réseaux spécifiquement helvétiques – responsables politiques, associations patronales, groupes de réflexion (think tanks), etc. – dans l’essor international du néolibéralisme. Notre recherche se propose de combler cette lacune sur la base d’un large corpus de sources inédites.
En s’inscrivant dans une conceptualisation du néolibéralisme comme projet politique, elle adopte une méthodologie multi-archivistique basée sur une approche d’histoire sociale dans une perspective transnationale, appuyée par la prosopographie et l’analyse des réseaux. La recherche est structurée en trois axes thématiques et une partie transversale.

L’axe 1, pris en charge par Margaux Lang, entend éclairer l’action des acteurs patronaux suisses et leurs réseaux transnationaux, en mobilisant des groupes moins connus que les associations patronales traditionnelles ou les partis politiques, à savoir les groupes d’intérêt bourgeois. Le Redressement national, né en 1936 du rapprochement entre des organisations frontistes, anticommunistes et patronales, est parmi les plus importants de la période et sera au cœur de ce volet de la recherche. Reconstruisant les liens qui l’unissent au projet néolibéral, ce premier axe permettra d’étudier les moyens d’action, positionnements et financements des principaux acteurs du néolibéralisme en Suisse.

Dans l’axe 2, étudié par Hadrien Buclin, il s’agit de retracer la genèse, dans les associations patronales, les partis politiques, les institutions officielles et le débat public, des réformes de type néolibéral entreprises par les autorités suisses. Celles-ci se concrétisent en particulier dans le domaine des assurances sociales, de la politique fiscale et monétaire, des privatisations de régies publiques, et de la déréglementation des marchés. L’objectif est d’étudier l’impact du tournant néolibéral sur les politiques publiques de la Suisse pour mesurer sa portée, mais aussi, à travers celle-ci, la circulation internationale des politiques d’inspiration néolibérale.

Enfin, l’axe 3, assumé par Gabriella Lima, étudie la participation de la Suisse au projet néolibéral global porté par les institutions financières internationale dans les pays de la périphérie dans le contexte de la crise de la dette des années 1980. Les acteurs helvétiques, tant publics que privés, participent à la démarche d’institutions comme le Fonds monétaire international (FMI), la Banque mondiale (BM), mais aussi la Banque des Règlements internationaux (BRI), le Club de Paris ou l’Institute of International Finance (IIF), qui utilisent les négociations portant sur l’échelonnement des dettes pour pousser les pays concernés à adopter une série de mesures néolibérales. Il sera ainsi possible d’éclaircir le rôle d’acteurs suisses dans un épisode marquant du tournant néolibéral international.

Finalement, une partie transversale du projet, prise en charge par Janick Marina Schaufelbuehl, systématise l’étude des rapports entre les associations patronales et réseaux néolibéraux au niveau global. Ce projet permettra de mieux comprendre les modes de fonctionnement des réseaux néolibéraux, leur interaction avec la sphère publique et gouvernementale ainsi que d’élucider les déterminants économiques et sociaux du tournant néolibéral, ce à partir d’une perspective transnationale qui, tout en restant attentive aux dimensions globales de son objet de recherche, dégage les particularités helvétiques et sert à éclairer un moment complexe et marquant de l’histoire suisse contemporaine, jusqu’ici peu étudié. Les deux thèses de doctorat ainsi que les publications issues du projet, la collaboration avec des chercheur·euses en Suisse et à l’international, l’organisation de deux rencontres scientifiques et les liens avec les médias assureront une large diffusion aux résultats de cette recherche.

 

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