Docteure Paola Bezzi - Département des neurosciences Fondamentales, UNIL
Professeur Pierre Marquet – Unité mixte international - Département de psychiatrie, Centre hospitalier universitaire Vaudois (CHUV).
Professeur Paul Klauser – Unité de recherche sur la psychose – Département de psychiatrie, Centre hospitalier universitaire Vaudois (CHUV)
Paul Klauser est professeur assistant à la faculté de biologie et de médecine de l’UNIL, médecin associé dans le service de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent du CHUV et directeur de l’Unité de recherche sur la psychose au Centre de neurosciences psychiatriques du CHUV. Il est au bénéfice d’une double expertise, à la fois clinique (médecin spécialiste en psychiatrie et psychothérapie de l’enfant et de l’adolescent) et scientifique (PhD en neurosciences ; formation postdoctorale en neuroimagerie) qui lui permet de conduire des projets de recherche translationnelle impliquant non seulement des aspects cliniques, mais également de neurobiologie et de neuroimagerie pour améliorer le diagnostic et développer de nouveaux traitements.
Une recherche avec les patients pour les patients
L'Unité de recherche sur la psychose cherche à mieux comprendre les mécanismes neurobiologiques qui sous-tendent la psychose afin d’améliorer la prise en charge des jeunes qui souffrent d’un trouble du spectre de la schizophrénie ou d’un autre trouble psychotique. L’Unité conduit une recherche dite « translationnelle » qui se base à la fois sur l’étude des patients participant à la recherche (cohorte psychose de Lausanne) et sur des expériences de laboratoire.
L’Unité est aussi très engagée dans la formation de jeunes cliniciens-chercheurs qui ont une activité mixte de clinicien en psychiatrie avec les patients et de chercheurs en laboratoire. Les cliniciens- chercheurs jouent en effet un rôle essentiel pour maintenir le dialogue entre les patients, leur besoins et les travaux des chercheurs en neurosciences psychiatriques. L’Unité est donc composée d'une équipe multidisciplinaire qui comprend à la fois des scientifiques (biologiste, physicien, biochimiste) et des cliniciens (médecin, psychologue, art-thérapeute).
Améliorer le diagnostic chez les jeunes
Actuellement, le diagnostic de psychose repose uniquement sur un ensemble de signes et symptômes. Nous recherchons donc des marqueurs biologiques de la maladie dans le sang. Ces biomarqueurs pourraient être utilisés, non seulement comme aide au diagnostic, mais également pour personnaliser le traitement.
Notre unité teste aussi une nouvelle technique d’imagerie spectroscopique par résonance magnétique (MRSI) qui permet cartographier les concentrations de neurométabolites dans le cerveau. La très grande sensibilité de cette méthode devrait permettre de détecter des altérations cérébrales subtiles, très tôt durant le développement de la maladie, pour un diagnostic et une prise en soins plus précoces.
Développer des nouveaux traitements pour les jeunes
Nous travaillons aussi au développement de cultures cellulaires cérébrales issues de cellules souches pluripotentes induites (IPSC). Ces cellules sont obtenues à partir de biopsies de la peau chez les participants à notre cohorte. Ainsi, nous avons la possibilité d’étudier les caractéristiques biologiques des cellules cérébrales de patients (p. ex. neurones) et tester de nouvelles molécules qui pourraient un jour être utilisées comme médicaments.
Professeur Philippe Conus – Programme TIPP – Département de psychiatrie, Centre hospitalier universitaire Vaudois (CHUV)
Philippe Conus est médecin, spécialiste en médecine interne avant de se tourner vers la psychiatrie, avec un intérêt particulier pour la schizophrénie. Il travaille de 2000 à 2003 à Melbourne dans un programme spécialisé dans la détection et l’intervention précoce dans les troubles psychotiques. A son retour en Suisse il lance un programme similaire d’intervention précoce à Lausanne, programme qui a depuis lors pris en charge près de 1000 jeunes patients. En 2010 il est nommé professeur à la faculté de biologie et médecine de l’université de Lausanne et il prend la direction du service de psychiatrie générale du CHUV.
Président de l’association internationale d’intervention précoce en santé mentale (IEPA.org), il travaille depuis plus de 20 ans en étroite collaboration avec le centre de neurosciences psychiatriques (Prof Kim Do, puis actuellement prof Paul Klauser) avec lesquels il explore entre-autre le rôle du stress oxydatif et de l’inflammation dans le développement des psychoses. En 2017, il a reçu le grand prix de la Fondation Halphen décerné par l’Académie des Sciences de l’institut de France pour son travail de recherche translationnelle.
La nécessité d’identifier des biomarqueurs
Les psychoses sont un groupe de maladies caractérisées par la présence d’hallucinations, d’idées délirantes ou de désorganisation de la pensée. Survenant à l’adolescence ou au début de l’âge adulte, elles ont un impact majeur et potentiellement durable sur le fonctionnement.
La détection précoce de ces troubles est un objectif majeur, dans le but de minimiser l’impact du premier épisode et de limiter les risque de rechute. L’identification des personnes à risque e psychose permettrait aussi de prévenir la survenue du premier épisode. Mais sans connaissance des mécanismes neurobiologiques liés à ces troubles, on ne peut pas identifier de biomarqueurs qui permettraient une détection plus précoce des patients.
Rôle du stress oxydatif dans la psychose
Prof Kim Do a observé en 2000 par une étude de spectroscopie, que les personnes présentant une schizophrénie ont un déficit du principal anti-oxydant naturel cérébral : le glutathion. Diverses études conduites chez des patients chroniques puis dans la cohorte psychose émergente, ont confirmé cette hypothèse et permis de mieux comprendre l’impact du déséquilibre oxydatif qui en résulte sur la structure cérébrale (lésions de la substance blanche), le fonctionnement des neurones régulateurs des signaux (interneurones à parvalbumine) et le fonctionnement de certaines synapses.
Un essai clinique a été conduit chez ces jeunes patients, qui a mis en évidence que l’adjonction au traitement habituel d’un précurseur du glutathion (la N-acétyl-cystéine) augmente le taux de glutathion cérébral, normalise la structure de la substance blanche, améliore la cognition et diminue certains symptômes.