Nelly Valsangiacomo

Nelly Valsangiacomo est professeure d’histoire contemporaine à la Faculté des lettres de l’UNIL et directrice du Centre des sciences historiques de la culture (SHC). Ses domaines de prédilection sont l’histoire sociale et culturelle suisses et du territoire alpin, l’italianité, les médias et les sources audiovisuelles, ainsi que l’histoire des sonorités. Ses recherches actuelles portent sur les sonorités dans l’espace alpin. Dans le cadre du projet Val d’Hérens 1950-2050, elle collabore à l’étude HérISon et réfléchit sur les environnements sonores. Elle fait également partie de l’équipe ayant mis sur pied la Plateforme Paysage.

 

Interview du 5 juillet 2023

 

Mélanie Clivaz (MC): Vous êtes directrice du Centre des sciences historiques de la culture (SHC). Pourriez-vous nous présenter ce centre ?

 

Nelly Valsangiacomo (NV) : Le Centre des sciences historiques de la culture (SHC) est né autour du grand intérêt pour les études culturelles qui s’est développé il y a une vingtaine d’années. Des collègues de diverses sections de la Faculté des lettres, notamment des sections d'histoire, de français, d'histoire de l'art et d'histoire et esthétique du cinéma ont donc décidé de réorganiser une ancienne structure préexistante et de développer un Pôle de compétences interdisciplinaire rattaché à la Faculté des Lettres qui propose un ensemble d'enseignements et de recherches dans les domaines des approches historiques de la culture et de l'intermédialité. Il réunit plusieurs projets de recherche en lien avec des institutions partenaires en Suisse comme à l'étranger. Il faut au moins en évoquer le premier et fondateur : Viaticalpes, coordonné par Claude Reichler. Ce projet de recherche centré sur l’histoire culturelle des voyages en Suisse et dans les Alpes a aussi donné lieu à une base de données d’images, Viatimages, dont je rappelle la principale coordinatrice, Daniela Vaj, chercheuse bien connue par les membres du CIRM.


SHC est aussi un pôle de compétences qui propose une spécialisation interdisciplinaire dans le cadre des enseignements de master à 120 crédits, qui touche aux domaines de l'histoire sociale et culturelle, de la littérature moderne et contemporaine, de l'étude des images fixes et des images mobiles (histoire de l'art, de la photographie, du cinéma et de la bande dessinée), des arts du spectacle et de l'exposition et depuis quelque temps aussi des sonorités.

 

 

MC : Vos recherches actuelles portent sur les sonorités dans l’espace alpin. Quels sont vos axes de recherche ?

 

NV : Mes axes de recherche se cristallisent autour d’une histoire culturelle du social. Depuis un certain nombre d’années, je m’intéresse aux sources audiovisuelles. Je viens de terminer la coordination d’un projet dans le cadre du PNR76 (assistance et coercition) sous le titre «Derrière les scandales. Les enjeux médiatiques des politiques publiques». Mené en collaboration avec des collègues historien·ne·s, sociologues et économistes, ce projet s’est intéressé au rôle des discours notamment radiophoniques et télévisuels dans la construction des politiques sociales et dans leur réception.

Passionnée par les sources radiophoniques et sonores, j’ai aussi entamé un deuxième axe, celui des sonorités, qui est actuellement au cœur de mes intérêts. J’ai travaillé sur les vocalités, mais surtout je me suis intéressée à l'espace alpin et je me suis interrogée sur l’écoute de ce territoire. Jusque là, ce sont surtout les villes et les zones urbaines qui ont intéressé les études sur les environnements sonores. En travaillant sur ce sensible, j’ai fait un petit pas de côté pour coordonner avec le collègue Jon Mathieu, spécialiste d’histoire des Alpes, un petit ouvrage plus général sur le sensorium alpin, en prenant en compte aussi les autres sens; déjà paru en allemand, il sortira cet automne auprès des éditions Antipodes de Lausanne.

Un troisième axe, origines obligent !, est celui de l’Italianité, qui m’accompagne depuis longtemps et qui ressurgit régulièrement. J’ai créé avec le collègue Niccolò Scaffai le Pôle de recherche sur l’Italianité (RécIt) et actuellement avec deux autres collègues, Rosita Fibbi e Marco Marcacci, nous sommes en train de coordonner un ouvrage qui s’occupent de quelques aspects de l’Italianité en Suisse.

En général, j’aime beaucoup travailler dans l’interdisciplinaire : dernièrement j’ai eu l’occasion de travailler aussi avec des chercheuses et chercheurs artistes et ceci a été très enrichissant. En effet, si je réfléchis à mes objets de recherche, ce sont toujours les marges et les frontières qui m’intéressent, métaphoriques ou réelles, sociales ou culturelles.  

 

 

MC : Vous coordonnez un ouvrage sur les sonorités dans l’espace alpin. Que pourrons-nous trouver dans cet ouvrage ?

 

NV : Avec Laine Chanteloup, professeure à l'IGD, nous avons coordonné un premier ouvrage sur les questions de sons et de l’écoute dans les Alpes. Nous avons demandé à une douzaine de chercheuses et chercheurs de différentes disciplines de se pencher sur la question. Les approches sont diverses et complémentaires: littérature, sound studies, géographie, éco-acoustique, disciplines artistiques, psychologie, droit... les disciplines et les questionnements sont nombreux. Notre intention est de vérifier comment une approche par le sensible, notamment par l’ouïe, peut proposer de nouvelles réflexions sur ce territoire si fragile en cette période particulièrement complexe. Notre espoir: que l’écoute soit une entrée féconde pour mieux comprendre l’espace alpin, analyser, déconstruire et prospecter différentes visions du passé et du futur de nos montagnes. Certain·e·s auteur·e·s travaillent depuis longtemps sur les questions des sonorités. D’autres, ont saisi l’occasion pour ouvrir leurs perspectives. Toutes et tous ont joué le jeu et on les remercie vivement ! L’ouvrage est en cours d’impression et il paraîtra début septembre aux Editions Antipodes de Lausanne.

 

 

 

MC : Vous êtes également une instigatrice de la Plateforme Paysage, développée à l’UNIL. Quel est son rôle et ses actions ?

 

NV : La Plateforme Paysage est un très beau projet conduit par le SHC et le CIRM avec pour objectif de réunir les nombreux projets autour du paysage qui sont présents au sein de l’Université de Lausanne et de lancer des collaborations d’enseignement et de recherche autour de cet objet qui peut être appréhendé avec différentes approches. Viaticalpes, dont j'ai parlé plus haut, a été un des projets phares, mais nous souhaitons prolonger et ouvrir plus largement la thématique à d’autres champs de recherche. Pour cela, cette plateforme a été créée au printemps 2021. Nous avons développé un enseignement interdisciplinaire et interfacultaire commun qui est à sa troisième année et qui connaît un bon succès. Entre-temps, nous avons pu organiser des colloques et des journées d’étude, nouer des liens avec d’autres universités, par exemple avec les collègues géographes de Padoue et enfin, nous avons aussi pu relancer des collaborations avec d’autres institutions culturelles et des associations de protection du paysage, à l’exemple de Patrimoine suisse et de la Fondation suisse pour la protection et l’aménagement du paysage. Le SHC et le CIRM sont deux centres voués à l’interdisciplinarité et cette expérience met à profit les compétences et les disciplines respectives.

 

 

 

 

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