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Karine Crousaz, Érasme et le pouvoir de l'imprimerie, Antipodes, Lausanne, 2005.
Érasme, surnommé le "Prince des humanistes", était un des plus grand succès de librairie de son temps. Franck Hieronymus a estimé que les œuvres d'Érasme ont bénéficié, avant la mort de l'écrivain en 1536, d'environ 1260 impressions ou réimpressions. Si nous multiplions ce nombre par un tirage moyen de 1'000 exemplaires, qui est même légèrement sous-évalué, nous obtenons plus de 1,2 millions d'exemplaires. Ce chiffre, qui ne tient pas compte des éditions philologiques d'auteurs antiques réalisées par Érasme, reste certes théorique. Il peut cependant nous donner une idée de la présence de l'humaniste hollandais dans le paysage éditorial du début du XVIe siècle. Bien entendu, la grande majorité des ouvrages ainsi recensés correspond à des réimpressions faites par des imprimeurs avec lesquels Érasme n'a eu aucun contact direct.
La question centrale de cette étude est de savoir ce que l'humaniste pensait de l'imprimerie et comment il a évalué et valorisé le pouvoir de ce moyen de communication. Considère-t-il comme Rabelais dans son Pantagruel que c'est une invention divine, favorisant considérablement la cause des bonnes lettres et de l'humanisme? ou à l'inverse comme une technique au pouvoir dangereux, qu'il s'agit de contrôler soigneusement?
Il apparaît qu'Érasme, fort conscient du pouvoir de l'imprimerie, cherche certes à l'employer au mieux, mais également parfois à en limiter l'emploi pour les autres. Ce désir exprimé par l'humaniste que les autorités contrôlent la production imprimée est en effet passé sous silence par les spécialistes d'Érasme. Lorsqu'ils abordent le thème de la censure, c'est seulement pour indiquer les interdictions qui ont frappé les œuvres de l'humaniste, jamais pour se demander comment Érasme jugeait la censure de manière générale.
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