Ce colloque engagera une réflexion transversale sur les outils et les modes de fabrication de la ville contemporaine à travers quatre axes majeurs :
Axe I
Intensités : formes urbaines, mobilités et transition énergétique
L’avenir des villes dépend en partie de notre façon d’orienter leur développement spatial, de réguler les problèmes de mobilité et de maîtriser le tournant énergétique. Les structures de l’habiter et les modes de réalisation de la mobilité marqués par l’utilisation des énergies fossiles appartiendront bientôt au passé. Le durcissement des crises énergétiques peut-il encore laisser la place au doute ? Le secteur du bâtiment pourrait connaître un formidable essor s’il mettait à profit les opportunités offertes par l’architecture écologique. Mais la régénération et la modernisation écologique du bâti ne font pas la ville écologique. D’autres exigences plus larges se dessinent. Construire la ville en ce début de siècle signifie accepter aussi de nouvelles manières de réaliser la mobilité. La voiture ne sera plus le spiritus rector de l’urbanisme. L’est-elle encore ? Assiste-t-on déjà à une recomposition des modes et pratiques des déplacements autour du nouveau paradigme de la ville postcarbone, dense, compacte, multipolaire et intermodale ? Aménager durablement la ville signifierait peut-être moduler les registres de l’intensité urbaine (densité, compacité, diversité architecturale, polycentralité, etc.) et concevoir une approche globale des mobilités et des cadres bâtis, nouveaux et existants dans une triple visée : reconvertir l’offre et la demande énergétiques aux ressources renouvelables, maîtriser l’empreinte écologique, mieux qualifier les espaces urbains en mutation ?
Axe II
Ambiances : espaces publics, qualités urbaines, usages pluriels de la ville
Depuis les années 1980, la question de la qualité des espaces publics est devenue un objet significatif des débats et des pratiques d’aménagement. Le thème a été engagé par une attention croissante consacrée à la relation entre la qualité

de la vie urbaine et l’aménagement des espaces communs. L’urbanisme est ainsi invité à compléter les cadres de réflexion de la morphologie urbaine et de la nouvelle écologie urbaine qui se limite à explorer les relations entre l’organisation des tissus urbains et le bilan environnemental de leur fonctionnement. S’agit-il simplement d’un nouvel urbanisme de communication au service de la «ville stratège » ou encore une expression de plus de la « ville générique » ? Est-ce que l’urbanisme de ce début de XXIème siècle recherche aussi une meilleure adéquation entre l’organisation des structures matérielles des lieux et les aspirations différenciées des individus à la qualité urbaine ? Depuis quelques années, l’urbanisme végétal émerge comme instrument majeur de la composition urbaine, de la création de nouveaux espaces d’urbanité accueillant une diversité d’ambiances et d’usages. L’art, les scénographies nocturnes et de nouvelles conceptions du mobilier urbain investissent les places, les rues, les parcs et les jardins de la « ville créative ». Espaces publics et nouvelles technologies fusionnent aussi, constituant une alternative intéressante au couple que forment depuis plusieurs décennies l’hyper-commerce et l’automobile, produisant une « réalité augmentée » et offrant peut-être une nouvelle chance à une ville « marchable » ? Partout on s’interroge : comment toucher les sens, intensifier, embellir, enchanter, étonner par ce qu’offre l’espace commun aux habitants ? De quelles manières les approches sensibles peuvent-elles enrichir l’analyse urbaine et les outils de qualification des espaces communs ? A quels élargissements innovateurs du répertoire des outils de conception, de fabrication et de gestion de la ville la prise en compte de l’aspiration à la qualité urbaine nous oblige-t- elle ?
Axe III
Solidarités : faire la ville juste
Dans sa genèse, la ville accumule les richesses en même temps qu’elle révèle et cristallise les divisions de la société et les fragmentations de l’espace vécu. Ce début du XXIème siècle nous apporte un changement profond des modes de production et de distribution de la richesse. Le nouvel ordre marchand et financier de la ville contemporaine révèle chaque jour son incapacité à assurer le lien social structurant notre présent et notre avenir proche. La ville postindustrielle, informationnelle, globalisée, sans cesse redéfinie par les mutations technologiques et économiques, renverse les images de la ville et transforme le rapport des groupes sociaux à l’espace. Autrefois enraciné dans la ville, le bourgeois, le « riche », est désormais celui qui peut tirer le meilleur avantage de la « ville à la carte » et jouer sur des échelles de relations spatiales multiples. Il est privilégié par son capital « mobilitaire » et sa capacité à se déterritorialiser parfois dans l’entre-soi sécuritaire des « gated communities ». En revanche, le « pauvre » est « assigné à résidence », dans un espace qu’il n’a pas choisi, limité dans ses possibilités de tirer avantage de l’accès aux qualités d’un environnement

urbain complexe et multiscalaire. Le menu ordinaire de la « ville à la carte » est-il à portée de tous ? Comment faire la ville juste ? Comment s’assurer que les qualités de la ville peuvent être équitablement partagées dans un contexte de diversité radicale ? Quelle est au « plus juste » la signification de la ville juste ? Quels sont les leviers de la fabrication d’une qualité urbaine partagée, de la capacité d’accès à l’offre urbaine des populations en situation de précarité ? Comment éviter les effets d’éviction inhérents aux nouvelles formes de gentrification? Comment éviter le glissement vers « la ville franchisée », payante ? Au sein des projets urbains, quelles sont les innovations conceptuelles, techniques et organisationnelles qui émergent pour prendre en compte les usages fragiles de la ville ?
Axe IV
Confluences : la ville diffuse, l’entre-deux et les échelles du grand territoire
A la lisière des régions métropolitaines l’agriculture occupe toujours une grande partie des territoires laissés en héritage par le XXème siècle. Mais l’urbain s’y installe avec ses nouvelles résidentialités, ses activités économiques, ses équipements de loisirs et ses réseaux multiples. L’urbanisme de la ville compacte et de la densification intelligente reste en grande partie discursif et le retournement de la tendance démographique des centres annoncé par les observateurs de la gentrification n’a pas désamorcé l’étalement urbain. Des tiers espaces, « multi-appartenants », se constituent ainsi à la confluence de la ville et de la campagne. Dans les régions de montagne, des zones d’urbanisation insulaire, des terrains de jeu touristiques des métropoles, se constituent pour répondre aux demandes renouvelées de ludicité des citadins. Le bilan global de ces évolutions est contrasté. Lieux de concurrences et de conflits, les nouveaux périmètres urbanisés s’enrichissent aussi de nouvelles fonctionnalités. Si les politiques de régulation mises en œuvre ces dernières années ont été faites pour mieux gérer les zones plus intensément urbanisées et construire la ville vers l’intérieur, il n’est plus certain que la question de l’organisation de l’espace, dans les zones à urbanisation dispersée ou insulaire soit seulement subsidiaire. Comment faire la ville dans ces territoires de l’entre-deux en recomposition accélérée ? Faut- il limiter à tout prix l’étalement urbain ou plutôt accompagner ou structurer les nouvelles extensions urbaines ? Peut-on concevoir des démarches d’aménagement intégrées permettant de conjuguer urbanité et ruralité dans de nouveaux périmètres de concertation et de projet dans une triple visée de limitation de l’enfrichement agricole, de préservation des paysages et de maîtrise du mitage urbain ? La matrice de travail des démarches projectuelles doit-elle se déporter davantage vers l’échelle des grands territoires où se mêlent l’hyperville, les espaces périurbains et les zones encore rurales ou naturelles ?
Le programme des conférences et ateliers est disponbile sur le site dédié aux journées