2019 - Israël

FOUILLE ARCHÉOLOGIQUE D’UN VILLAGE EN GALILÉE (ISRAËL)

Cette fouille archéologique d'un village en Galilée (Israël) a eu lieu 12 août-1er septembre 2019 et a été organisée par David Hamidovic, professeur à l’Université de Lausanne, en partenariat avec le Kinnereth College of Galilee. Cette fouille a été partiellement soutenue par le CIHSR.

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Présentation du site

Lors de sept campagnes de fouille archéologique sur la colline naturelle de Yodfat de 1992 à 1998 et en 2000, les archéologues ont mis au jour un village à l’habitat continu depuis l’époque hellénistique (IVe siècle avant l’ère chrétienne) à sa destruction au début de l’époque romaine (milieu du Ier siècle de l’ère chrétienne). 

Le site de Yodfat est situé au nord-ouest de la Galilée inférieure, à une vingtaine de kilomètres au nord de Nazareth. La colline est entourée d’autres collines plus hautes et il était à l’écart des voies romaines (comme on peut le voir sur la carte).

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Vue aérienne de la colline avec les murs de fortification et le village au sommet.

Le site est de taille modeste : une centaine de mètres carrés. L’importance de ce site et sa réputation depuis l’Antiquité tardive lui viennent des mentions dans l’œuvre de l’historien juif Flavius Josèphe qui écrit à la fin du Ier siècle de l’ère chrétienne. Celui-ci prit le maquis avec d’autres juifs en révolte contre l’occupant romain à partir de 66 de l’ère chrétienne. Il se chargea de fortifier dix-neuf sites en Galilée et sur le plateau du Golan (Guerre des Juifs 2,573-576 ; Autobiographie 187-188). Seuls les sites de Yodfat, Yapha, Migdal/Magdala, Gamla et le mont Tabor connurent la confrontation militaire. Le siège et la bataille de Yodfat à l’été 67 sont narrés en détail dans son livre Guerre des Juifs 3,145-288.316-339. La fouille archéologique a confirmé en grande partie le déroulement, ses détails et ajouter des précisions aussi intéressantes que surprenantes. 

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Vue depuis la colline. Au sommet, le kibboutz moderne de Yodfat. Cerclé de rouge, le village post-67 (hypothèse large).

Fouille du village au pied de la colline

La fouille de la colline est (presque) terminée, mais il reste une partie du site qui n’a reçu, à ce jour, aucune attention particulière de la part des archéologues, si bien qu’aucun sondage archéologique n’a été effectué. Pourtant, il existe une bande de 200 mètres sur 50 mètres, au pied de la colline, qui était habitée. Il reste en surface des pierres d’habitations en ruine. Il a existé un village à l’époque mamelouke, au Moyen Âge, mais des indices (pierres taillées en réemploi, fragments de poterie) laissent deviner un habitat plus ancien. On ne sait de quelle(s) époque(s), il s’est agi.

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Synagogue ? Porte d’entrée probable avec le seuil (?) et un jambage de porte encore debout.

Objectifs de la fouille

On pense qu’il a existé un village quelques décennies ou siècles après la destruction du village sur la colline. S’agit-il d’habitants revenus sur leur lieu de vie quelques années après la destruction ? S’il s’agit de cela, il ne pouvait effectivement pas revenir habiter sur la colline car les Romains avaient jeté des cadavres humains et animaux dans les citernes. L’impureté maximale du site était ainsi garantie. S’agit-il d’autres personnes s’installant plus tardivement et sans lien avec les événements de la révolte contre les Romains ? La mémoire vive de ce lieu entretenue par les écrits de Flavius Josèphe rend difficile cette hypothèse. À ce stade, on imagine un lien potentiel avec les événements tragiques, mais lequel ? La fouille a pour but de livrer quelques indications.

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Site fouillé (2019), orientation Nord-Sud.

Cette année, avec Mordechai Aviam du Kinneret College Institute et Kate Raphael, nous visons principalement à fouiller un lieu précis : celui que nous pensons être un ancien bâtiment à usage collectif, peut-être une synagogue.

La connaissance des premières synagogues échappe encore en grande partie. S’il s’agit d’une synagogue antérieure au IIIe s. de l’ère chrétienne, il s’agira vraisemblablement d’une structure avec des bancs en pierre adossés aux murs, orientée vers Jérusalem, et sans décoration conformément au précepte juif interdisant les représentations. S’il s’agit d’une synagogue postérieure au IIIe s. de l’ère chrétienne, il se peut qu’elle soit décorée de mosaïques comme celles magnifiques découvertes ces dernières années dans la région, et qu’elle soit dotée d’une structure pour recevoir le rouleau de la Torah. En l’état, nous n’avons aucune indication sur la datation de cette couche stratigraphique ; nous ne sommes même pas sûrs qu’il s’agisse bien d’une synagogue. Par ailleurs, le nom de ce lieu est inconnu : est-ce le même que Yodfat en hébreu/araméen ou Jotapata en grec ? En bref, beaucoup de questions basiques demeurent avant la fouille.

Résultats de la première saison de fouille

Grâce aux étudiants de l’UNIL notamment, nous avons dégagé une grande partie du bâtiment aux époques mamelouke, croisée et byzantine. Ces datations ont été permises grâce à des monnaies et des tessons de poterie. Le bâtiment rectangulaire mesure 10,80m X 15,70m selon un plan basilical simple. Les murs solides de 80-85 cm d’épaisseur pouvaient soutenir un second étage. Le bâtiment est orienté selon un axe Nord-Sud et son entrée matérialisée par un seuil massif est au centre du mur méridional. Des fragments de pierres servant de pavements sont situés devant le seuil, ce qui suggère une large cour ou une esplanade. Le bâtiment a eu aussi une entrée plus petite dans le mur occidental ; l’entrée est bloquée et scellée aux époques fouillées. Prof. Georgina King de l’UNIL/FGSE a effectué des prélèvements du seuil et sur d’autres endroits du bâtiment en vue d’une datation par thermoluminescence. Aux époques fouillées, le bâtiment a été subdivisé en cloisons et des traces d’occupation mamelouke (type squatters) ont été repérées. Des futs de colonne et des piédestaux ont été utilisés en réemploi, certains ont été réemployés aux époques fouillées, d’autres sont plus anciens. Il s’agit probablement de spolia de la colline attenante car aucun fut ou piédestal ne semble correspondre à un autre fut ou piédestal. Il est, par ailleurs, difficile de voir des colonnes effondrées, ce qui peut suggérer un réemploi pour un appareillage avec d’autre pierres et/ou avec des poteaux en bois. La fouille des strates inférieures s’avère donc primordiale pour comprendre la fonction originelle du bâtiment.

Par ailleurs, nous avons procédé à des photographies par drone du village entier grâce à Francis Mobio (FTSR) et à des repérages in situ avec Régis Aligon (FTSR) afin d’établir une première cartographie du village.

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