Le film Traduire est le dernier volet d’une trilogie après D’une langue à l’autre et Langue sacrée, langue parlée.
C’est un film-Babel où des traducteurs de différents pays, s’exprimant chacun dans sa langue, parlent de leur expérience de passeurs de la littérature hébraïque écrite à travers les siècles : le Midrash, la poésie hébraïque médiévale, la littérature moderne et contemporaine. Les traducteurs parlent avec passion de la confrontation avec une langue qui les amène parfois à transgresser les règles de leur propre langue. C’est une littérature dans laquelle coexistent souvent différentes strates. Dans l’hébreu moderne, l’entrelacement de toutes ces couches peut donner lieu à des effets d’humour et d’ironie, mais ne facilite pas la tâche du traducteur. Anna Linda, traductrice en italien de S.Y. Agnon (prix Nobel de littérature) parle même de la « cruauté » de l’auteur qui n’indique pas les sources de ses nombreuses citations. L’hébreu d’Agnon l’a amenée à ce qu’elle appelle l’« agnon-isation » de la langue italienne. Ala Hlehel, traducteur en arabe d’une pièce de théâtre de Hanoch Levin, dit : « Je devais renoncer aux lois de ma langue… ». Pour Chana Bloch, traductrice en anglais de la poétesse Dahlia Ravikovitch, il s’agit de « forcer les limites de ce qui est confortable, voire tolérable, en anglais ». C’est un film avec thème et variation où, à partir d’une même langue, des interprétations en voix et en langues différentes se font entendre. Pour Edouard Glissant, la traduction est « art de la fugue parce que chaque traduction aujourd’hui accompagne le réseau de toutes les traductions possibles, de toute langue en toute langue ».
Nurith Aviv a réalisé dix films et fait l’image d’une centaine de fictions et documentaires avec entre autres, Agnès Varda, Amos Gitai, René Allio…
Passionnée par les langues, par le passage de l’une à l’autre, Nurith Aviv a réalisé ces dernières années une trilogie autour de l’hébreu. Elle enseigne dans des écoles de cinéma en France, en Allemagne et en Israël et participe à l’émission d’Arte : Die Nacht / La nuit. Une rétrospective de ses films a eu lieu au Jeu de Paume en 2008. Elle a été lauréate du prix Edouard Glissant en 2009.
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