La Cinémathèque suisse est actuellement reconnue comme l’une des principales institutions culturelles du pays et l’une des plus anciennes et plus riches archives de cinéma au monde. Dès sa fondation en 1948, prenant la suite des Archives cinématographiques suisses de Bâle (1943-1948), la Cinémathèque suisse s’est employée à préserver la mémoire du cinéma mondial et national. Grâce à la progressive mise en place d’une politique de dépôt et d’acquisition, elle a constitué une collection de films et de documents « non-film » de référence, tout en s’affirmant dans son domaine comme un acteur culturel incontournable. À partir de la loi fédérale sur le cinéma (1962), elle s’est vue octroyer une subvention fédérale destinée à soutenir une mission patrimoniale de sauvegarde de ses collections et au premier chef de la production nationale.
Le projet « Cinémathèque suisse : une histoire institutionnelle » se propose de retracer les étapes et les mécanismes de l’institutionnalisation de la Cinémathèque, du statut d’association locale et privée, à celui d’archive au rayonnement national et international. S’il s’appuie essentiellement sur l’ample fonds des archives administratives de la Cinémathèque suisse, il prévoit également des recherches dans plusieurs autres archives en Suisse (notamment municipales, cantonales et fédérales) et à l’étranger.
Il coïncide avec une période de transformation importante pour la Cinémathèque suisse, qui inaugurera prochainement à Penthaz son nouveau Centre de recherche et d’archivage et doit faire face, comme ses consœurs étrangères, aux défis de la révolution numérique. La recherche, dirigée par François Albera (Professeur honoraire, Section d’histoire et esthétique du cinéma), est soutenue par le Fonds national suisse de la recherche scientifique (FNS) pour une durée de trois ans (2013-2016).
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Ce projet dirigé par le prof. Alain Boillat (Section d’histoire et esthétique du cinéma, Faculté des lettres, UNIL) a obtenu le soutien du Fonds national suisse de la recherche scientifique (FNS), qui finance dans ce cadre trois doctorants pour une période de 3 ans à partir de novembre 2013. Cette recherche, menée en collaboration avec deux chercheurs de la Section de français (le prof. Gilles Philippe et Vincent Verselle), sera principalement développée à partir du fonds « Claude Autant-Lara » de la Cinémathèque suisse, composé d’un très riche ensemble de documents relatifs aux scénarios et conservés en un nombre important d’états et de versions. Il s’agira de rendre compte des techniques d’écriture qui ont prévalu à l’époque « classique » du cinéma français en mettant l’accent sur trois adaptations d’œuvres de Stendhal (Le Rouge et le noir, Lucien Leuwen et La Chartreuse de Parme) par les scénaristes Jean Aurenche et Pierre Bost. L’objectif de cette recherche située à la croisée d’une démarche historienne et d’une perspective théorique consiste à établir, à partir notamment des acquis de la génétique textuelle, un cadre méthodologique permettant une analyse comparative des textes et des films, ainsi qu’une étude des évolutions et caractéristiques formelles repérées dans les variantes. La réflexion porte sur le processus de la création scénaristique, sur la manière d’étudier la genèse d’un film dans une perspective académique, sur l’adaptation de textes littéraires au cinéma et sur le contexte de production, de diffusion et de réception des films d’Autant-Lara.
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Ernest (dit Nag) et Gisèle Ansorge comptent parmi les plus importants cinéastes d’animation non seulement en Suisse, mais aussi sur le plan international. Fameux avant tout pour leurs films de sable, ils ont aussi développé d’autres techniques et œuvré dans divers cadres (fictions ; films de commande ; films sur l’art et films psychiatriques). Leur carrière commune est documentée par un important fonds d’archives papier et audiovisuelles conservé par la Cinémathèque suisse.
La recherche se développera selon trois axes. Il s’agit d’abord de situer le cadre général dans lequel s’inscrit la carrière des Ansorge (avènement d’un « nouveau cinéma suisse », institutionnalisation progressive de l’animation entendue comme une pratique particulière), d’examiner leur place particulière au sein du champ cinématographique, mais aussi par rapport à l’Etat, et finalement dans des espaces particuliers comme l’institution médicale. En termes de pratiques, le cinéma des Ansorge se développe en fonction d’aspects techniques, de choix esthétiques et de modalités de travail collectif qui, une fois mis en évidence, permettront de comprendre les procédures de l’animation cinématographique jusque dans son inscription sociale et institutionnelle. Finalement, l’étude des films permettra de situer l’inventivité formelle et esthétique en fonction de ces cadres institutionnels et techniques.
Mêlant analyse socio-culturelle, technique et esthétique, le présent projet contribue à mieux faire connaître des acteurs importants du cinéma en Suisse et à analyser des pratiques souvent méconnues, comme celles développées dans le cadre d’un atelier cinématographique dans un hôpital psychiatrique.
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La marque d’appareils cinématographiques Bolex, liée à l’entreprise vaudoise Paillard, est devenue le symbole de toute une génération de caméras mécaniques fabriquées à l’intention des cinéastes amateurs. Bolex se cantonna dans le domaine du cinéma substandard (16 mm et 8 mm, principalement) et, contrairement à la firme allemande Arri ou à la société française Éclair, ne produisit pas de machines exclusivement professionnelles. Issues des techniques de l’industrie horlogère suisse, les caméras de cette marque étaient des appareils solides, compacts et faciles d’utilisation, dont des cinéastes amateurs du monde entier firent l’acquisition pour réaliser leurs films de famille ou de voyage (voir l’ouvrage récent de Thomas Perret et Roland Cosandey, Paillard-Bolex-Boolsky, Yverdon-les-Bains, Éditions de la Thièle, 2013).
Malgré l’orientation de la marque, ces caméras passèrent aussi entre les mains de cinéastes professionnels, qui les trouvèrent parfaitement adaptées à la production de films industriels ou de reportages télévisés, sans oublier les œuvres expérimentales de Maya Deren, de Jonas Mekas et de Stan Brakhage. Au-delà des caméras qui ont fait la renommée de Bolex, la marque proposa une large gamme de produits domestiques pour le titrage, le montage et la projection, permettant ainsi aux utilisateurs de contrôler personnellement les différents paramètres de la fabrication et de la présentation de leurs films. Les ingénieurs de Paillard s’attachèrent également à suivre l’évolution générale du matériel cinématographique, en introduisant des innovations technologiques telles que la sonorisation et la stéréoscopie dans le champ des pratiques amateurs.
Ce projet de recherche sous la direction de Benoît Turquety vise à appréhender la production industrielle de Bolex en examinant notamment les collections d’appareils de la Cinémathèque suisse et la documentation afférente (notices, catalogues, publicités, etc.), ainsi que les archives administratives de Paillard conservées aux Archives cantonales vaudoises. Il s’agit d’abord de se livrer à une archéologie des techniques en articulant l’examen des machines Bolex proprement dites avec l’étude des politiques de l’entreprise dans un contexte évolutif et concurrentiel. Il est nécessaire ensuite de se pencher sur l’histoire culturelle de la promotion et de la distribution des appareils sur le plan local ou national, mais aussi, compte tenu du volume des exportations, à une échelle internationale, pour mettre en relation les produits Bolex avec leurs usagers. L’analyse croisée des machines et des discours permettra à la fois de décrypter une réussite technico-commerciale et d’identifier les pratiques et les enjeux culturels du cinéma amateur en Suisse.
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Ce projet vise d’abord à circonscrire le champ des manifestations du cinéma « industriel » sur le territoire transfrontalier franco-suisse au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, en les situant dans un contexte où les relations entre la sphère cinématographique et le monde de l’entreprise s’intensifient, mais où la production de films, l’édition de revues et l’organisation de festivals sont aussi impulsées à l’extérieur des espaces consacrés du cinéma, à la demande d’entrepreneurs, d’ingénieurs et de publicitaires. Sur la base de cet état des lieux, il s’agit de développer l’hypothèse que les connexions entre cinéma et aviation, ainsi que les objets techniques et filmiques qu’elles génèrent en nombre, sont principalement suscités, de part et d’autre, par des objectifs industriels de rationalisation, d’expansion et de persuasion.
Le projet explore ainsi quatre pistes complémentaires de recherche allant dans le sens de cette proposition : 1. il s’agit d’abord de mesurer l’apport de fabricants d’appareils cinématographiques qui misent sur l’essor d’applications techniques du cinéma touchant directement le secteur de l’aviation, en produisant du matériel spécifiquement à destination des services de recherche et développement des grandes entreprises ; 2. il faut s’interroger ensuite sur l’appropriation du cinéma comme technique persuasive par l’industrie aéronautique, au moment où elle s’en fait un auxiliaire privilégié dans le processus de sécurisation de la masse de ses clients potentiels, façonnant un imaginaire du voyage aérien sûr et paisible ; 3. c’est aussi à ces objets techniques hybrides que sont les appareils de projection « embarqués » pour le cinéma en vol qu’il faut s’intéresser, en tant que leur introduction à bord des avions relève de stratégies commerciales de détournement et de focalisation de l’attention ; 4. il reste enfin à faire apparaître la dimension productive de films que l’on tend à interpréter univoquement comme relevant du cinéma « amateur », alors que leur réalisation est également motivée par des activités professionnelles, des voyages d’affaires et des visites de sites industriels.
L’idée d’une consolidation mutuelle du cinéma et de l’aviation conduit à reconsidérer sous l’angle de leur fonctionnalité et de leur productivité les images et les appareils cinématographiques qui se sont intercalés à différents niveaux dans le rapport aux technologies du transport aérien. Mené par Stéphane Tralongo dans le cadre de son mandat de Premier assistant à la Section d’histoire et esthétique du cinéma de l’UNIL, ce projet en lien avec les recherches sur le « cinéma utilitaire » s’attache à mettre en relation appareils, films et documents des années 1940-1970 conservés par la Cinémathèque suisse, qui a recueilli de précieux fonds d’archives issus du monde industriel helvétique.
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Ce projet de recherche dirigé par Alain Boillat et Charles-Antoine Courcoux (UNIL) et soutenu par le FNS sur une période de 3 ans (2016-2019) vise à étudier les mécanismes de fabrication des représentations dans la production cinématographique française des années 1940. Le contexte de production des films est majoritairement reconstruit et examiné à partir de documents issus du fonds d’archives Claude Autant-Lara de la Cinémathèque suisse et considérés à la lumière des outils théoriques et méthodologiques forgés par la narratologie filmique, les études de genre, les star studies et l’histoire culturelle. Une base de données sera établie afin de faciliter l’accès aux sources en fonction de critères pertinents. Grâce au caractère exceptionnellement exhaustif et riche du fonds Claude Autant-Lara, l’objectif est d’élaborer une approche génétique permettant de documenter les étapes de la création en les inscrivant dans leur contexte socio-historique et en explorant, à travers les variantes scénaristiques, ce que furent les possibles envisagés par les auteurs, notamment en fonction des actrices et acteurs pressentis ou choisis.
La périodisation (1942-1949) correspond à la fois aux premiers films officiellement attribués à Claude Autant-Lara comme unique réalisateur (à partir du Mariage de Chiffon, 1942), à la naissance du trio qu’il forme avec ses deux scénaristes Jean Aurenche et Pierre Bost (à partir de Douce, 1943) ainsi qu’à un moment charnière pour le vedettariat français qui, après une décennie dominée par des stars masculines vieillissantes, connaît une féminisation et un rajeunissement au moment de la reprise de la production dans le contexte de la France occupée. Les têtes d’affiches de notre corpus constitué de l’ensemble des films tournés par Claude Autant-Lara dans les années 1940 sont révélatrices de ce phénomène : Odette Joyeux, Micheline Presle ou Gérard Philipe sont des étoiles montantes incarnant des identités genrées modernes.
Deux axes de réflexion sont privilégiés : on se penche d’une part sur l’articulation entre la fabrication et la réception d’une image de vedette, d’autre part sur le processus de création des personnages au sein de réseaux définis par des modalités spécifiques de construction des rapports et des identités de genre.
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Contacts :
Carine Bernasconi (Carine.Bernasconi@unil.ch)
Pierre-Emmanuel Jaques (Pierre-Emmanuel.Jaques@unil.ch)
Site web : www.unil-cinematheque.ch