Présentation
Après Stockholm (2005) et Québec (2007), l’Université de Lausanne organisait en septembre 2009, à l’instigation du Centre de linguistique et des sciences du langage et de la section de français de la Faculté des Lettres, la troisième édition du colloque international «Le français parlé dans les médias»
La manifestation a rencontré un écho favorable auprès de chercheurs d’horizons variés, tous intéressés au fonctionnement des discours oraux médiatiques et de leurs enjeux sociaux. Les contributions qui suivent cette préface constituent les actes du colloque lausannois. Ancrées principalement dans les domaines des sciences du langage et des sciences de l'information et de la communication, elles témoignent bien, nous a-t-il semblé, de la qualité des échanges interdisciplinaires qui ont eu lieu.
Si l’oralité des médias sous toutes ses formes a été généralement au centre de l’attention, le colloque de Lausanne avait pour thème plus spécifique les relations complexes entre les médias et la sphère politique.
Il est un fait qu’entre les médias et le monde politique, la relation est indéfectible autant que problématique. En tant que rapporteurs des faits et événements d'intérêt public, les médias ont notamment pour mission de tenir leurs audiences informées des affaires politiques. De même, en tant qu'instances déterminant l'organisation de l'espace public, les politiques ne sauraient se passer des médias pour se faire entendre du plus grand nombre afin d'asseoir leur légitimité et leur crédibilité.
Cependant, le contexte actuel de globalisation, de développement technologique, et plus généralement les marchés de forte concurrence contraignent les pratiques des médias, y compris les discours. Qu'il s'agisse des médias de service public ou non, on observe une extension du répertoire des stratégies de captation des audiences. Engagée depuis un certain temps, la tendance à afficher l'équivalence (ou à mêler les repères) entre espace privé et espace public, entre expertise fondée et spontanée, entre appel à l'émotion et argumentation modifie le rôle des instances médiatiques : journalistes et animateurs sont des acteurs auto-légitimés à intervenir dans des thématiques concernant les affaires de la Cité et de l'Etat, investissant ainsi le domaine privilégié des politiques.
Dans un tel contexte, la logique de fonctionnement médiatique tend à imposer à la sphère politique des formats contraignants, ainsi que des thématiques dont le lien avec les affaires publiques est indirect ou a priori non pertinent. Les politiques tout à la fois s'y adaptent et les exploitent. Quant aux mises en scène médiatiques du politique, quel que soit le média, on observe une tendance à la peopolisation qui entraîne une redéfinition de l'image même du politique où l'accent est mis sur les personnes privées plus que sur des idées ou un programme politiques.
De fait, les exigences médiatiques et politiques se surdéterminent mutuellement jusqu'à entraîner une redéfinition, par degrés, des pratiques discursives réciproques et de leurs enjeux sociaux : qu'est-ce qu'informer à propos de politique dans les médias ? Qu'est-ce qu'un discours politique en tant qu'il est destiné à être médiatisé ? De tels questionnements ont été au centre de la rencontre lausannoise.
Plusieurs axes de questionnement ont été proposés, qui permettaient d’interroger une grande variété de discours politico-médiatiques, c’est-à-dire des discours abordant les affaires de la Cité et de l'Etat produits dans les médias professionnels privés et de service public (la télévision, la radio, la presse écrite et internet). Vu l’ambition interdisciplinaire du colloque, les contributeurs avaient, d’une manière générale, pour consigne d’expliciter leur méthode et leurs catégories d'analyse et de privilégier la description de données empiriques constituées en corpus.
Les contributions aux Actes du colloque se répartissent, compte tenu de ce qui précède, dans les sections suivantes, correspondant aussi aux axes de questionnement proposés :
- Les aspects interactionnels des discours politico-médiatiques.
Ce premier axe touche à l’analyse de la gestion interactive de la parole, ainsi qu’à l’analyse de la dimension multimodale de la communication. - Les aspects génériques des discours politico-médiatiques.
Les contributions de cet axe opèrent une spécification et une problématisation des genres médiatiques et politiques, y compris une analyse contrastive des genres. - Les aspects génétiques des discours politico-médiatiques.
Cet axe traite des états successifs de la constitution des discours et/ ou des moments interactionnels. D’une manière générale, cet axe favorise les considérations « historicisantes » des discours. - Les aspects interculturels des discours politico-médiatiques.
Cet axe focalise sur les approches contrastives des discours ancrés dans des sphères culturelles différentes. Il tient aussi compte des déterminations liées au phénomène de la globalisation - Les aspects stratégiques des discours politico-médiatiques.
Les contributions de cet axe traitent des stratégies mise en œuvre au sens œuvre et des mises en scène discursives qu’elles favorisent : au plan de l’argumentation, de la narration, des appels à l'émotion, ou des négociations identitaires des faces et des places.