En quoi consiste votre poste actuel ?
Je suis actuellement responsable qualité à la Haute École pédagogique Fribourg. Il s’agit d’un poste rattaché au rectorat, dont le mandat principal est de coordonner l’ensemble des activités d’évaluation interne ainsi que d’amélioration continue. Par exemple, je mets en œuvre l’évaluation des enseignements par les étudiant·e·s, les retraites semestrielles de direction (où les cadres de l’institution prennent de la hauteur sur son pilotage) et les plans de développement des secteurs et départements. C’est également mon service qui s’occupe de tout ce qui touche à l’accréditation institutionnelle (selon la LEHE, loi d’encouragement des hautes écoles), et de manière plus générale de la promotion d’une culture qualité au sein de la haute école.
Pourquoi avoir choisi cette voie ?
Pour être franc, c’est cette voie qui m’a choisi. Le COVID et le coup d’état de 2021 en Birmanie ont stoppé net mes ambitions postdoctorales : j’avais obtenu une bourse FNS pour poursuivre mes recherches sur l’activisme environnemental dans le pays, mais comme le projet n’était plus du tout réalisable, j’ai dû la décliner. Après un passage par plusieurs contrats courts et à faibles taux avec l’UNIL, l’UNIFR et l’UNIBE ainsi que par le chômage, j’ai vu ce poste à la HEP Fribourg et tenté ma chance. Comme l’institution était au début de sa procédure d’accréditation institutionnelle et que j’avais été deux fois évaluateur externe pour le compte de l’agence fédérale d’accréditation (AAQ) en parallèle de ma thèse, ils m’ont recruté.
Qu’est-ce qui vous plait dans votre poste actuel ?
Si j’ai toujours un pincement au cœur en pensant à la Birmanie aujourd’hui, je pense que ce virage professionnel m’a apporté énormément. Déjà durant mes études et ma thèse je m’intéressais beaucoup à la gouvernance de l’UNIL et des institutions académiques suisses. Dans mon poste actuel, j’ai la chance de travailler quotidiennement avec tous les corps de métiers et les publics qui font vivre une haute école, ce qui est fascinant puisque cela me confère réellement une vision à 360° sur l’institution. En outre, comme l’assurance qualité est un domaine d’activités encore parfois mal compris, voire décrié dans l’éducation supérieure, c’est un beau défi intellectuel et humain pour moi que de le rendre compréhensible, utile et « sexy » ! Et j’aime beaucoup les défis.
Utilisez-vous des savoir-faire que vous avez développés à la FGSE ?
La compétence la plus importante dans mon travail aujourd’hui est la pensée systémique : toute décision relative, par exemple, à l’évaluation des enseignements aura des implications opérationnelles pour le service IT, générera des coûts à répercuter sur les budgets, engendrera des réactions plus ou moins émotionnelles chez le personnel enseignant, affectera la relation des étudiant·e·s avec ce dernier, etc. En assurance qualité, il faut constamment essayer de prendre tous les paramètres, tous les aspects de la gouvernance d’une haute école en compte. À un niveau plus basique, la gestion de projet de manière autonome et efficace est également une compétence fondamentale que j’ai pu développer dans le cadre de ma thèse et qui me sert au quotidien.
Qu’est-ce qui, à l’époque, avait motivé votre venue en FGSE ?
En 2012 (ce qui ne me rajeunit pas…), j’avais rejoint le MSc en géographie, mention études urbaines pour approfondir les connaissances acquises dans le cadre de mon BSc en urbanisme obtenu à Lyon. J’avais rapidement changé d’orientation toutefois, ayant découvert en arrivant à l’UNIL la spécialisation « études du Développement » et par là même mon intérêt pour les enjeux sociaux et environnementaux dans les pays du Sud, ainsi que pour la coopération internationale.
Quels liens avez-vous aujourd’hui avec vos activités à la FGSE ?
Si le lien n’est pas forcément évident de prime abord, l’assurance qualité et la coopération au développement ont beaucoup de points communs : la logique et les « bonnes intentions » d’amélioration institutionnelle qui sous-tendent les deux domaines sont similaires, de même que les risques de dérives technocratiques et néolibérales qui les accompagnent. En ce sens, ce que j’ai appris à la FGSE me sert aujourd’hui de garde-fou et de ligne de conduite éthique dans mon travail. C’est d’ailleurs aussi cela qui guide mon engagement bénévole en parallèle : depuis 2020, je préside Bénévolat Fribourg Freiburg, le centre de compétence pour la vie associative et les organisations à buts non-lucratifs dans le canton de Fribourg.
Sur un plan plus personnel, j’ai gardé des liens avec les collègues et ami·e·s dont j’étais le plus proche durant mon travail de terrain en Birmanie – la plupart sont parties étudier ou travailler à l’étranger depuis le coup d’état – et j’essaie de les soutenir au mieux de mes possibilités. Je suis un peu plus à même de le faire maintenant que je suis sorti de la précarité postdoctorale et que j’ai un emploi et un revenu stables.
Comment s’est passée pour vous la transition professionnelle vers un rôle extra-académique ?
Je ne suis pas sûr d’avoir transitionné complètement ! Si mon rôle est en effet formellement administratif à la HEP Fribourg, je reste dans une posture relativement académique : j’ai (re)commencé à lire de la littérature scientifique dans le domaine de l’assurance qualité et de la gouvernance des hautes écoles, nous écrivons un article avec une collègue, et j’ai même demandé à reprendre une petite charge d’enseignement, parce que cela me manquait. Par ailleurs, je vais en fait très prochainement rejoindre la HEP Vaud en tant que chargé d’enseignement (équivalent à MER à l’UNIL) et de missions assurance qualité : un poste académique qui combine enseignement, recherche appliquée et soutien au pilotage institutionnel d’une haute école. Tout ce que j’aime !
Entretien publié le 31 mars 2023.