Colloques 2019-2020

Débattre des fictions | Réécritures, adaptations, traductions, mises en scène
 

Débattre des fictions

Mardi 2 et mercredi 3 juin 2020

 

REPORTÉ POUR CAUSE DE PANDEMIE AU 13 ET 14 NOVEMBRE 2020


UNIL, Château de Dorigny, salle 106.

Colloque de relève organisée par la FDi (resp. : Jérôme Meizoz) dans le cadre du colloque interdisciplinaire «Débattre des fictions» (Paris 3 Sorbonne, automne 2020), co-organisé par Fabula, the International Society for Fiction and Fictionality Studies et la Formation doctorale interdisciplinaire de l’UNIL. Les deux colloques sont destinés à préparer un numéro de Fabula-LhT sous la direction d’Aurélien Maignant, Françoise Lavocat et Marc Escola.

 

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Argument

Chimène pouvait-elle épouser Le Cid? La Princesse de Clèves a-t-elle bien fait d’avouer à son mari qu’elle était aimée d’un autre homme? Pourquoi Cendrillon ne s’est-elle pas rebellée plus tôt? Meursault était-il raciste? Hercule Poirot a-t-il commis une erreur sur l’identité du meurtrier? Les Lannister devaient-ils absoudre Ned Stark? Don José pouvait-il épargner Carmen? Néo aurait-il dû se soumettre à la prophétie de l’Oracle? Peut-on accepter d’entrer dans les raisons de Humbert Humbert et faut-il faire lire Lolita aux adolescents d’aujourd’hui? Horace devait-il s’abstenir du meurtre de Camille? Fallait-il vraiment que Dumbledore cache la vérité sur le destin d’Harry? Manon a-t-elle sincèrement aimé Des Grieux, et le récit du chevalier est-il toujours bien honnête? Faut-il blâmer Charles de la mort d’Emma?

De quelle nature sont nos jugements sur les fictions? À quelles opérations se livre-t-on pour simplement en parler et très régulièrement en débattre? Car la fiction n’est pas seulement l’objet d’une expérience individuelle vouée à rester silencieuse: elle est aussi ce dont on parle avec d’autres lecteurs ou spectateurs, ce qu’on partage à condition d’en débattre, de confronter des opinions et de soumettre un jugement à la discussion. Mais de quoi discourt-on au juste lorsqu’on s’interroge sur la conduite d’un être de papier, qu’on débat d’une situation fictive ou qu’on revient sur un dénouement arbitraire? Dans nos échanges les plus quotidiens sur les fictions, peut-on seulement départager les propositions qui portent sur l’œuvre de celles qui portent sur le monde fictif, et les jugements sur la situation fictionnelle des jugements sur le monde réel? Si le débat s’accompagne toujours d’une intervention sur la fiction, quels sont les enjeux éthiques ou politiques d’une telle ingérence?

Les multiples querelles et controverses dont les fictions ont fait l’objet en Occident ont été largement étudiées par l’histoire littéraire, notamment en ce qu’elles nous instruisent sur les représentations du monde réel et les pratiques esthétiques à travers le temps. Le débat sur la fiction mérite toutefois d’être constitué comme objet théorique. L’interrogation qui préside à ce nouveau numéro de Fabula-Littérature Histoire Théorie est aussi simple qu’abrupte: que faisons-nous avec les fictions et aux fictions elles-mêmes lorsque nous débattons d’elles?

 

Ajouter à la fiction, refaire l’histoire

La réception conflictuelle d’œuvres littéraires, dramatiques ou cinématographiques est souvent le lieu d’une participation active aux univers fictionnels. Dans sa réflexion sur la transfictionnalité (Fictions transfuges, Seuil, coll. «Poétique», 2011), Richard Saint-Gelais a épinglé sous le nom de «parafictionnalisation» la tendance de la critique, et sans doute aussi de tous les lecteurs, à ajouter aux mondes de fiction des propositions qui leur sont exogènes, le plus souvent pour leur donner du sens — l’exemple canonique tenant dans la reconstruction des intentions d’un personnage pour expliquer une action que rien ne justifie dans l’œuvre originelleà l’instar d’un meurtre ou d’une décision politique. On entrevoit alors l’enjeu éthique que peut prendre la relation de l’interprète aux possibles d’une œuvre.

Faut-il nécessairement agir sur les fictions ou modifier leur fable pour en parler? Et surtout, quel est le rôle des croyances esthétiques, morales ou politiques des débattants? Comment conditionnent-elles leurs interventions sur le monde fictif?

Peut-on isoler certains aspects poétiques, rhétoriques ou narratologiques qui favorisent ce type d’intervention des lecteurs ou spectateurs? L’interrogation accordera sans doute un privilège aux fables sérielles où le débat sur les choix créatifs s’accompagne souvent d’une «récriture» («Il aurait été plus juste que ce personnage agisse ainsi...»), à celles qui mettent en œuvre un débat moral explicite (Horace de Corneille ou 12 Angry Men de S. Lumet), aux récits qui présentent des «vides» ou des incohérences manifestes (Shutter Island de M. Scorsese, American Horror Story de R. Murphy ou les différentes littératures fantastiques) ou aux œuvres qui invitent à mettre en doute la fiabilité de leur(s) narrateur(s) (Lolita de V. Nabokov, Le Meurtre de Roger Ackroyd d’A. Christie ou Dexter de J. Manos Jr.).

 

Expériences en débat

À une autre échelle, on pourrait se demander si le débat ne devient pas le lieu d’une mise en jeu collective de différentes versions personnelles et singulières de l’expérience vécue face à l’œuvre. À l’ère du numérique et de la transmédialité, où la frontière entre commentaire et participation au monde fictif est rendue sans cesse plus instable, peut-être faut-il aborder le discours sur la fiction comme une proposition d’expérience du monde fictif et le débat comme le lieu où se construisent ces propositions, qu’elles soient esthétiques, politiques ou morales.

La question de la référentialité de la fiction joue ici un rôle prédominant (F. Lavocat, Fait et fiction, Seuil, 2016). On peut l’envisager pour les œuvres qui prennent pour matière des faits réels, souvent à l’origine de vifs débats (ex. La Reprise de Milo Rau ou Jan Karski de Y. Haenel). Comment l’interprétation versionne-t-elle lorsqu’elle a conscience de la factualité du récit source?

En philosophie éthique (Sandra Laugier (dir.), Éthique, littérature, vie humaine, PUF, 2006) ou en narratologie (Blakey Vermeule, Why Do We Care about Literary Characters, John Hopkins, 2010), nombre de recherches contemporaines prêtent attention au rôle de l’expérience vécue dans ou face à la fiction. Au prisme de réflexions sur l’empathie, les émotions ou encore l’immersion, on pourra aussi interroger le rôle que jouent ces paramètres «expérientiels» dans le débat éthique sur les fictions, notamment sur la possibilité de collectiviser son expérience personnelle du récit ou du monde dans un discours interpersonnel.

 

Juger le personnage, juger avec le personnage

Sur le plan moral, des approches comme celle de M. Nussbaum (Connaissance de l’amour, Cerf, 2010; L’Art d’être juste, Climats, 2015) ont attiré l’attention sur l’effet éthique des fictions et sur la manière dont nous jugeons les personnages. Que le personnage soit une personne n’est pas défendu comme un parti-pris théorique, mais comme une réalité qu’on pourra dire cognitive ou phénoménologique: si le récepteur peut prendre position, si la fiction peut susciter un débat moral, c’est parce que les objets à juger ont pour lui une épaisseur, parce que leurs comportements sont susceptibles de résulter de la même complexité psychologique que les comportements humains réels. Une analyse de débats avérés sur les choix des protagonistes (p.ex. les scandales qu’ont suscité Tueurs nés d’O. Stone, J’irai cracher sur vos tombes de B. Vian ou Les Paravents de J. Genet) pourrait sans doute éclairer ce volet pragmatique de la question: quel rôle joue exactement le personnage, sa définition, ses valeurs et ses expériences dans les débats moraux des lecteurs ou des spectateurs? Formuler un jugement au sortir d’une lecture, d’une séance de projection ou d’un spectacle, est-ce opter pour le point de vue, les valeurs et les croyances d’un personnage plutôt que d’un autre? En quoi nos perspectives sur les personnages divergent-elles de celles des autres personnages? Là encore, la question poétique de la participation au monde recoupe l’interrogation éthique: comment le jugement formulé sur le personnage fait-il varier l’univers fictif?

 

Modalités de participation

Les contributions, issues de toutes disciplines de sciences humaines, porteront sur des corpus de fiction, idéalement transhistoriques ou transmédiaux, mais peuvent aussi relever de l’étude de cas.

Les propositions des doctorant·e·s. et post-doctorant·e·s (environ 2000 signes, avec titre, bibliographie), devront être envoyées avant le 1er mars 2020 à: Jerome.Meizoz@unil.ch et fdi@unil.ch avec copie à : marc.escola@unil.chromain.bionda@fabula.org et jeannelle@fabula.org

Les auteurs et autrices seront informés des résultats en mars et rendront un résumé définitif pour la brochure du colloque le 10 avril 2020. Enfin, la version définitive de l’article est à rendre au plus tard le 15 décembre 2020.

 

Appel à contributions

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Réécritures, adaptations, traductions, mises en scène

Jeudi 14 et vendredi 15 novembre 2019

UNIL, Internef, salle 233 pour jeudi 14 et Château de Dorigny, salle 106, pour le vendredi 15 novembre.

Colloque de relève organisé par la FDi (Alberto Roncaccia) et la Section d'anglais (Martine Hennard Dutheil de la Rochère)

Conférences plénières

  • Liliane Louvel, Professeure émérite de Littérature anglaise (Université de Poitiers) et présidente de IAWIS/IAERTI  

  • Duncan Large, Professor of European Literature and Translation and Academic Director of the British Centre for Literary Translation (University of East Anglia, Norwich)

  • Perluigi Pellini, Ordinario de Letteratura Italiana Contemporanea (Università degli Studi di Siena)

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Problématique
La question de la réécriture touche à la signification et aux motivations les plus profondes de tout geste artistique ou démarche liée à la représentation. Comme le remarquait Paul Ricoeur, «Écrire, c’est réécrire. Pour l’historien tout ce qui fait énigme devient défi à l’égard des critères de ce qui, à ses yeux, fait qu’une histoire peut être suivie et acceptée» (Temps et récit, Paris, Seuil, 1983, p. 219). Si le rapport à la réalité implique déjà un acte de recomposition sélective qui mobilise des codes, des genres et des références communes, dans ce colloque nous proposons d’examiner des pratiques transformationnelles qui relèvent du domaine de l’intertextualité et de la transtextualité. La notion de réécriture sera employée dans son acception la plus large, qui ne se limite pas au texte écrit mais concerne tout acte de récupération, de réutilisation et de réinterprétation d’éléments appartenant à une ou à plusieurs œuvres préexistantes.

Ce type de transfert touche principalement la littérature, qu’il s’agisse de la réécriture d’auteur, de la parodie, de la traduction, de la censure, ou, de façon plus générale, de l’imitation et de l’émulation, longtemps constitutives du "devenir auteur". Au-delà de la sphère strictement littéraire, les pratiques de transformation concernent toutes les formes artistiques, qu’elles entretiennent ou non une relation directe avec des textes littéraires: art figuratif, théâtre, danse, photographie, cinéma. En dehors du domaine strictement artistique, l’historiographie et l’histoire de la philosophie sont aussi marquées par la reprise, la réorientation idéologique et la réécriture.

L’observation de ces phénomènes de transfert, traduction, transposition et transmédiation ne peut se limiter à l’identification de relations de dépendance ou d’influence, figées dans une sorte de spécularité plus ou moins manifeste entre objets esthétiques différents. Concernant la littérature, nous nous proposons de revisiter la taxinomie de Gérard Genette (Introduction à l’architexte, Seuil, 1979; Palimpsestes, Seuil, 1982) dans cette optique. Le véritable enjeu nous semble se situer en effet dans le processus dynamique, à la fois critique et créatif, de réorientation des formes et du sens qui permet de redéployer, ailleurs et autrement, les hypotextes sous-jacents: la réécriture produit ainsi une œuvre singulière et configure une réception nouvelle. En se constituant à travers la mémoire interne d’un réseau d’hypotextes, cette nouvelle création active des fluctuations de genre, suscite des métamorphoses de sens, détermine son médium et s’actualise à partir de situations énonciatives propres. Pour saisir ces dynamiques, nous pourrons faire référence au concept productif de «transcréation».

Pour ce colloque, nous proposons d’étudier des cas spécifiques de réécriture, d’adaptations, de traductions, de mises en scène et de transposition, afin de saisir les stratégies transformationnelles à l’œuvre ainsi que leurs effets.

 

Agenda et contact

Les propositions d’exposés sont attendues pour le 17 septembre 2019 au plus tard, par voie d’e-mail à l’adresse:

Alberto.Roncaccia@unil.ch avec copie à fdi@unil.ch

Elles contiendront vos coordonnées académiques complètes, et pour votre proposition:

1) un titre, 2) une problématique d'environ 3'000 signes (espaces compris) et 3) une brève bibliographie de travail, aux références complètes.

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Programme
"Réécritures, adaptations, traductions, mises en scène"

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Résumés des présentations
"Réécritures, adaptations, traductions, mises en scène"

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