SOMMAIRE
Patrick SÉRIOT - Préface. Que font les linguistes aujourd'hui? (p. 1-4)
Jean-Michel ADAM - Passé simple et passé composé: une opposition temporelle ou énonciative? (p. 5-18)
On a tôt fait d’opposer le linguiste contemporain au grammairien du passé et de parer – selon le point de vue – l’un de toutes les qualités et l’autre de tous les défauts. Le présent essai a pour objectif de montrer que le linguiste est, dans une certaine mesure, l’héritier et le continuateur de travaux qu’il ne peut – et ne devrait – pas ignorer, même si son propos prioritairement descriptif s’écarte résolument du point de vue normatif, à visée scolaire et largement spéculatif du grammairien. J’ai choisi de revenir ici sur la célèbre «règle des 24 heures» car, en observant un débat de l’époque classique, on comprendra peut-être mieux l’apport du point de vue énonciatif et textuel de la linguistique contemporaine.
Anne-Claude BERTHOUD - Paroles à propos (p. 19-34)
Cet article a pour objectif de montrer en quoi la linguistique – linguistique conversationnelle et linguistique du discours – peut apporter aujourd’hui un regard spécifique et original à la problématique de la construction des objets du discours. Nous expliquerons ces enjeux au moyen de l’analyse d’un certain nombre de procédés linguistiques qui participent à la construction des objets du discours dans l’interaction verbale, et notamment ceux qui permettent au locuteur d’indiquer explicitement à l’interlocuteur à propos de quoi parle son discours et de le distinguer de l’argumentation qui en est proposée. Parmi ces procédés, la thématisation et certains connecteurs – tel parce que, notamment – constituent des moyens privilégiés, moyens que nous tenterons ici de développer et d’illustrer au travers de nombreux exemples, tirés de plusieurs types de discours.
Anna DUTKA - Pour une analyse linguistique du discours de la critique littéraire (p. 35-46)
On propose ici d’envisager les textes de la critique littéraire comme un discours marqué par une grande complexité énonciative. S’appuyant en contraste sur des travaux francophones et polonais, l’article étudie les fonctions de l’acte critique, déchiffrant une œuvre pour l’introduire dans le circuit social, les particularités de l’ambiguïté de la source énonciative («qui parle?») et le problème général de la «paralittérature».
Mortéza MAHMOUDIAN - Mythes et réalités en sémantique (p. 47-62)
Malgré la diversité des directions de recherche, on rencontre dans l’étude de la signification linguistique certaines idées constantes. Certaines d’entre elles – sans être fausses – comportent des limitations, des ambiguïtés, voire des contradictions. L’examen de ces concepts montre qu’ils sont pertinents, mais d’une valeur relative pour la transmission et la saisie de la signification (on citera ici le contexte, la situation, les traits sémantiques – leur finitude, leur parenté substantielle et leur constance – et l’autonomie de la signification linguistique face à l’expérience du monde). De ce premier constat, on est conduit à admettre que la structure sémantique présente une grande complexité; ceci a des conséquences importantes, parmi lesquelles on relèvera notamment la relativité de la communication linguistique et l’interdépendance entre langage et expérience. Il s’agit en fait de remédier à un excès de la linguistique structurale, qui, dans son enthousiasme, est allée un peu vite en besogne, ramenant les faits de langue à une structure formelle excluant toute variation ou relativité.
Lorenza MONDADA - Quelques enjeux d'une approche discursive des faits de langue (p. 63-76)
La notion d’«objet de discours» permet de reconnaître la dimension dynamique des faits de langue et de réfléchir à l’observabilité de certains processus discursifs. Les enjeux d’une telle approche sont illustrés à travers des exemples de textes et d’interactions verbales où se manifeste l’instabilité constitutive des objets de discours, à décrire moins en référence à des structures linguistiques préétablies que par rapport à la façon dont ils se déploient dans leur émergence et leur accomplissement.
Marianne KILANI-SCHOCH - Linguistique et aphasie (p. 77-88)
Cet article retrace l’évolution récente des relations entre linguistique et aphasie depuis la constitution de la neurolinguistique. Après avoir rappelé le rôle dominant qu’a joué l’appareil conceptuel de la linguistique pour la connaissance de l’aphasie, on montre à quel fractionnement des approches il faut se résoudre aujourd’hui. Les développements linguistiques, psycholinguistiques et neurolinguistiques de l’aphasie seront ainsi respectivement situés. A travers le débat sur l’agrammatisme on illustrera comment la linguistique a abordé le problème de la caractérisation de l’aphasie, quelles catégorisations en ont été proposées au fur et à mesure de l’apparition de nouveaux modèles, et enfin quelle orientation se profile désormais avec l’avènement du cognitivisme.
Patrick SÉRIOT - Aux sources du structuralisme: une controverse biologique en Russie (p. 89-104)
Les spécialistes en sciences humaines ont la responsabilité de faire connaître d’autres traditions, d’autres cultures, pour donner sens à la nôtre. Surtout lorsqu’il s’agit d’une culture comme la culture russe, si proche et si lointaine, qui n’est ni une altérité absolue comme la culture japonaise, ni pourtant parfaitement semblable à celle de l’Europe de l’Ouest. A l’heure où la Russie est déchirée par des bouleversements identitaires, faire l’histoire de sa linguistique revêt une importance primordiale: la «science russe» fait-elle partie de la culture européenne?
François ROSSET, Catherine SEYLAZ-DUBUID - Ceci n'est pas un texte: parcours bibliographique vers une définition du texte (p. 105-116)
Quand, pour des raisons pédagogiques, on cherche à mieux cerner la notion de texte à l’aide des travaux de linguistes parus ces dix dernières années, on s’aperçoit que, sur ce point, la linguistique propose des réponses très diverses, voire contradictoires. Après avoir passé en revue ces différentes prises de position, l’article montre qu’il faut abandonner l’espoir d’aboutir à une définition catégorique, car il y a autant de définitions du texte que de pratiques de celui-ci. Mais ce qui semble perdu pour une formalisation rigoureuse se retrouve dans la richesse et la diversité des pratiques qui ont le texte pour objet.
Claude SANDOZ - Une discipline carrefour: la linguistique indo-européenne
Au sein du groupe des langues dites indo-européennes, des ressemblances nombreuses et systématiques révèlent d’une part une communauté d’origine, d’autre part un jeu complexe d’interférences par delà les frontières linguistiques, dans le contexte d’échanges commerciaux et culturels. L’étude des affinités résultant d’une parenté génétique s’appuie sur une démarche comparative et fait appel à la méthode de la reconstruction. Cette approche, essentiellement historique, apporte à l’examen synchronique des faits un point de vue complémentaire. Ses domaines d’application, qui vont du déchiffrement de langues retrouvées à l’exploration de cultures archaïques, font de la linguistique indo-européenne une discipline carrefour.
Chronique annuelle de la Faculté des lettres, année académique 1992/1993 (p. 123-127)
Mémoires de licence soutenus à la Faculté des lettres en 1993 (p. 128-136)
Thèses de doctorat soutenues à la Faculté des lettres en 1993 (p. 136-137)
Ecole de français moderne (p. 137-139)
Chronique de la Société des Etudes de lettres (p. 140)