L’automate féminin dans la littérature de l’imaginaire
Dominique Kunz Westerhoff, professeur ordinaire, section de français, Faculté des lettres, UNIL
Vendredi 1er octobre 2021 de 9 h à 17 h – UNIL / Cours (21-LFR185)
Délai d’inscription : 3 septembre 2021
Le personnage littéraire d’automate féminin fait son apparition au début du 19e siècle, à travers la figure énigmatique d’Olimpia dans le conte fantastique d’Hoffmann intitulé L’homme au sable, mais il est précédé de fictions françaises de mannequins ou de poupées (Galli de Bibiena, Madame de Staël) créant l’illusion de la vie auprès d’admirateurs masculins.
Cet archétype narratif s’inscrit dans le paradigme scientifique d’une anthropologie mécaniste, fondée au 17e siècle par Descartes, que les Lumières interrogent et que le romantisme met à l’épreuve dans un imaginaire subversif de la démiurgie artificielle.
Le personnage de l’automate féminin hérite ainsi d’une tradition scientifique et technique des Lumières, celle des «Vénus anatomiques» et des automates réels produits par l’ingénierie horlogère. Toutefois, au tournant du 19e siècle, le motif s’entre-lace à la légende faustienne d’inspiration fantastique. C’est cette ambivalence de la conjecture scientifique et de la déviance transgressive qui marque dès lors la stéréotypie du personnage.
Au-delà de la spéculation imaginaire, ce sont des enjeux bien réels que métaphorisent les automates fictionnels, à commencer par les contraintes de l’industrialisation, le mimétisme social, la critique des représentations du féminin et de leurs pratiques régulatrices, l’exploration du désir et de ses illusions, et aujourd’hui, le fantasme des amours numériques.
Le corpus proposé aux maîtres consiste en une anthologie de textes enseignables (littérature française et francophone, avec quelques textes des littératures allemande et américaine et quelques extraits filmiques). Il suit le fil de la carrière de l’automate féminin et de ses renversements féministes sur deux siècles, au gré des changements de paradigmes scientifiques (l’électro-magnétisme, l’hystérie et la suggestion mentale, le robot industriel, le cyborg, le génie génétique, l’intelligence artificielle...) et des contestations sociales des normes de genre, aujourd’hui au cœur des débats.
L’étude du personnage met enfin en jeu des notions de grâce esthétique, de présence illusoire, d’effets de vie, d’imaginaire de l’étrange, tous aspects qui touchent à l’immersion romanesque et aux pouvoirs de la fiction.